1890 - 1945 | Naissance: | Arrestation: | Résidence:

Joseph BRODSKY (1890-1945)

Photo ci-contre provenant d’un document d’identité, collection personnelle de son neveu, Gérard Trokiner.

 

Cette biographie est le résultat d’un travail d’atelier mené en 2019 et 2020 par des élèves du lycée Alexandre-Dumas à Saint-Cloud. En plus du dossier documentaire transmis par l’équipe du projet Convoi 77, la biographie repose sur la consultation des  archives de la préfecture de police, des registres d’état civil de Saint-Cloud et de Paris, ainsi que d’un entretien avec Gérard Trokiner, neveu de Joseph Brodsky.

 

 

Par son certificat de naissance, transcrit en français en 1912 à l’occasion d’un premier mariage, nous savons que Joseph Brodsky est né le 27 mai 1890 à Ouman, dans l’empire russe (Ukraine actuelle). Après la naissance de sa sœur, Raymonde, en 1901 à Jaskov, les parents Soukhar et Sarah décident d’immigrer en France, en 1904 (d’après un renseignement fourni par sa sœur Raymonde dans une lettre de 1945).

 

Les raisons de cette émigration ne sont pas connues avec précision, mais on peut rappeler le contexte de violences antisémites que connaît la Russie à la fin du XIXe siècle. Ainsi, le journal L’Univers israélite rapporte, en date du 11 mars 1904, l’incendie de la synagogue d’Ouman, construite au XIe siècle, entraînant la disparition de rouleaux anciens de la Torah.

 

Quelques archives, notamment de l’état civil de Paris, constituent les seules traces qui permettent de connaître les grandes lignes de la vie de Joseph Brodsky en France.

 

Ainsi, le 7 novembre 1912, alors qu’il est âgé de 22 ans, Joseph Brodsky se marie avec Cécile Weinberg, 22 ans elle aussi, émigrée de Russie et fille d’un couple d’épiciers installés rue Montcalm (XVIIIe arrondissement). Dans l’acte de mariage, les parents de Joseph sont désignés comme sans profession, et habitant rue des Deux Ponts (IVe arrondissement). On apprend aussi que la mère de Joseph, Sarah, n’a pas signé l’acte de mariage, faute de savoir écrire. Joseph quant à lui est désigné comme ingénieur de profession : il s’est probablement formé en France, mais nous ignorons dans quelle école.

 

Jusqu’à son mariage avec Dora Choel en 1935, les renseignements sont plus disparates :

  • Le 19 novembre 1919, d’après le registre de demande d’autorisation de séjour des étrangers [, Joseph Brodsky apparaît comme résidant dans le XVIIIe arrondissement, rue Achille Martinet.
  • Son premier mariage est dissout par un jugement de divorce le 26 avril 1920. Un second mariage, avec Germaine Louise Alice Chardenot, doit avoir eu lieu après cette date, mais nous n’en avons pas retrouvé la trace : il n’apparaît qu’indirectement pour mentionner que Joseph a divorcé dans l’acte de mariage avec Dora Choel.
  • En juin 1925, Joseph obtient son permis de conduire : il est alors domicilié à Rouen, rue Jeanne d’Arc.
  • Joseph Brodsky obtient la nationalité française par décret le 15 septembre 1928 : ce dernier précise qu’il devient français au titre du 1er alinéa de l’article 6 de la loi du 10 août 1927 : « Les étrangers âgés de 18 ans et plus qui peuvent justifier d’une résidence non interrompue pendant trois ans en France » peuvent être naturalisés.

 

Son troisième mariage est célébré le 29 juin 1935 à la mairie du XVIIe arrondissement : âgé de 45 ans, Joseph Brodsky se marie avec Dora Choel, immigrée de Salonique (Grèce) âgée de 19 ans. On apprend sur l’acte de mariage que les parents de Joseph sont décédés ; ce dernier est installé rue Nollet (XVIIe arrondissement) : c’est là que le jeune couple s’installe, ainsi que l’atteste le recensement de 1936 (quartier Batignolles) : Joseph y est alors désigné sous le prénom de Jean, mais apparaît bien comme ingénieur, né en 1890, originaire de Russie et naturalisé.

En 1939, les époux emménagent à Saint-Cloud, au 19 bis de la rue du Calvaire.

 

Le 7 juillet 1944, Joseph est arrêté au 52 rue de Rome (VIIIe arrondissement) par la police française, en tant que juif. Cette arrestation est connue notamment par une lettre de sa sœur Raymonde, qui explique que Joseph était venu à son magasin pour voir sa vendeuse. Selon elle, son frère aurait été victime d’une dénonciation auprès de la Gestapo. Joseph et son épouse Dora ont effectivement pu vivre sous une fausse identité pour tenter d’échapper aux persécutions antisémites. On sait que Joseph Brodsky a pris le nom de son beau-frère Maurice Ciline, ce dernier ayant quitté la France pour New-York en 1939 avec son épouse Raymonde, sœur de Joseph. Le motif racial de l’arrestation est confirmé par deux témoignages de voisines, Jeanne Bilottet et Marthe Luciani, recueillis en 1952.

D’abord conduit rue des Saussaies, sans doute pour être entendu par la Gestapo, Joseph Brodsky est interné au camp de Drancy le 10 juillet 1944 : le reçu établi à son arrivée à Drancy, sur lequel il est dénommé Jean Brodsky, mentionne la somme de 1013 francs et une bague en or blanc.

Le 31 juillet 1944, Joseph Brodsky est déporté en direction du camp d’Auschwitz, sous le numéro 117500935.

 

D’après les archives, se fondant notamment sur le témoignage de deux autres déportés du convoi 77, Simon Razon, et Abraham (Avram) Michon, marié à une sœur de Dora Brodsky (Riquetta), Joseph Brodsky est mort le 22 janvier 1945, près du camp de concentration de Gross Rosen (Pologne actuelle). Il avait 54 ans. Le camp de Gross Rosen a recueilli les déportés ayant évacué Auschwitz à partir du 16 janvier 1945 ; il fut libéré par l’armée soviétique le 14 février 1945.

 

Sa sœur, Raymonde, partie aux États-Unis avec son mari Maurice Ciline en 1939, a écrit en mai 1945 à François Rosenauer, ancien interné de Drancy et engagé dans l’identification des disparus, pour tenter de connaître le sort de son frère.

Le 29 octobre 1953, à la suite des démarches de Dora Brodsky, Joseph Brodsky obtient par décision ministérielle le titre posthume de déporté politique ; le 17 juillet 1954, il est reconnu « mort pour la France ».

 

(archives personnelles Gérard Trokiner)

Contributeur(s)

Les élèves du collège Alexandre-Dumas à Saint-Cloud, sous la direction de leur professeur d’histoire, Nicolas Davieau.
1 commentaire
  1. Yael Polat 2 ans ago

    Bonjour,
    J’ai ete emue de trouver ce magnifique travail de recherche et de souvenir. Je suis la petite-niece de sa premiere femme, Cecile, dont je porte d’ailleurs le prenom (je suis Evelyne Cecile). J’ai en ma possession la photo de leur mariage.

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