Zlata DAWIDZON, née WALDBERG
ZLATA WALDBERG-DAWIDZON
Nous nous appelons Anna, Kaja, Judyta, Kacper et Katarzyna. Nous sommes des élèves de la filière littéraire au Lycée Międzynarodowego Liceum « Paderewski » à Lublin. Notre enseignante d’histoire, Anna Nadolska, nous a encouragés à participer au projet « Convoi 77 ».
Histoire des Juifs de Lublin
L’histoire de la ville de Lublin, habitée par une minorité juive depuis des siècles, est directement liée à cette communauté. Au fil du temps, la ville est devenue le symbole de l’essor de la culture hébraïque et du judaïsme orthodoxe. C’est pour cela qu’elle a souvent été qualifiée d’« Oxford juive » ou de « Jérusalem du Royaume de Pologne ». Dès la fin du XIXe siècle, les Juifs eux-mêmes commencèrent à se voir comme une minorité nationale, et non pas comme un groupe isolé de religion différente. Depuis lors, ils devinrent une partie active de la société de Lublin. On ouvrit de premières écoles juives, ainsi que de nombreux autres établissements servant la population de religion juive, entre autres l’hôpital parfaitement équipé de la rue Lubartowska et l’orphelinat de la rue Grodzka. Cependant, la culture juive ne prit son véritable essor à Lublin que dès 1915, lorsque la ville se retrouva sous domination austro-hongroise. L’attitude bienveillante de l’envahisseur favorisa l’activité des Juifs au sein de la société locale et, grâce à cela, en 1916, le premier mensuel juif en polonais, Myśl Żydowska [Pensée juive], put être édité. On ouvrit également nombre d’institutions culturelles, telles le théâtre amateur de Jakub Waksman ou la première bibliothèque publique. En plus, dans la ville fonctionnèrent alors 15 écoles juives privées, et les Juifs commencèrent à participer activement aux délibérations du Conseil municipal. En 1931, le nombre d’habitants juifs de Lublin s’élevait déjà à 38 935, et leur culture était en plein essor. De nouveaux centres sportifs, culturels et éducatifs furent créés, avec en tête la prestigieuse et moderne école rabbinique Yechiva Chachmei Lublin, ouverte en 1930 sur l’initiative du rabbin Meïr Shapiro. A l’époque, fonctionnèrent à Lublin 9 partis politiques juifs offrant aux jeunes la possibilité de s’engager dans la vie sociale. La presse juive s’épanouit également, enrichie de deux nouveaux titres publiés en yiddish: le Lubliner Tugblat [Journal de Lublin] et l’hebdomadaire Lubliner Sztyme [Voix de Lublin]. Les jeunes aspiraient de plus en plus à une assimilation dans le milieu polonais, faisant de leur culture une partie intégrante de l’histoire de notre ville.
- Arbre généalogique
Voici l’arbre généalogique de Zlata que nous avons reconstitué à partir des documents d’archives.
- Acte de naissance
Grâce à l’aimable soutien de l’employée des archives, nous sommes parvenus à retrouver l’acte de naissance de Zlata Waldberg dans le cadre de la requête n° 1753.
Grâce au travail sur le projet, nous avons pu obtenir des informations sur les coutumes et les règles de la communauté juive, par exemple que l’enregistrement de l’état matrimonial des juifs avait un caractère en deux étapes. Tout d’abord, le rabbin a effectué l’enregistrement et le rite religieux, puis l’enregistrement approprié par le greffier de la mairie / communauté a eu lieu.
C’est l’année 1914, le printemps, des fleurs fleurissent partout… c’est le 2 ou le 15 avril. Avant la Première guerre mondiale dans les documents officiels du Royaume de Pologne, on utilisait deux calendriers – julien et grégorien – d’où 12 journées de différence. Dans une maison, 101 rue Grodzka, un enfant vient au monde – une fille qui va recevoir, après sa grand-mère maternelle, le prénom de Zlata. La rue n’existe plus aujourd’hui sous le même nom mais si l’on continue vers la Porte Grodzka, nous pouvons toujours trouver un immeuble d’angle avoisinant 2 rue Zamkowa qui est probablement celui d’origine.
- Parents
Les parents de Zlata s’appelaient Waldberg Symcha et Sura Ita Wegsztajn.
Nous avons pu trouver l’acte de naissance de Symcha Waldberg.(P.J. nr 4) Il naquit le 12/24 août 1882, dans une maison n° 551. Ses parents étaient Icek et Estera Micenmacher. Nous avons réussi à obtenir aussi leur acte de mariage : ils se marièrent le 20 août / 1 septembre 1881 (PJ nr 8). Les parents de Sura s’appelaient Icek et Zlatta Band. Le père de Zlata était chapelier.
- Ecole
Malheureusement, nous n’avons pu retrouver des informations concernant l’éducation de Zlata, car les documents d’écoles juives n’existent plus. Nous espérions apprendre quelque chose à partir des documents d’écoles publiques de Lublin, cependant ils avaient été transmis aux archives dans un très mauvais état. Il y manquait entre autres les registres d’appel journaliers et les listes d’élèves par classes. La chance de retrouver des informations en cette matière étaient donc insignifiante.
- Acte de mariage
La date exacte est inconnue, mais le mariage a probablement eu lieu dans les années 1930–1936. Deux jeunes gens amoureux – Zlata Waldberg et Cadok Dawidzon – se marient. Il se peut qu’ils n’aient pas déclaré leur union, ce qui était un cas courant dans la communauté juive, ou qu’ils se soient mariés en France, car la trace de l’acte de mariage s’est perdue à jamais.
- Registres des habitants
Les registres de la population de Lublin d’avant-guerre (appelés « livres de la population permanente ») n’existent malheureusement plus. Ils furent détruits lors du bombardement de la ville pendant la Seconde guerre mondiale. Dans les archives, on ne trouve que des livres partiellement sauvés du XIXe siècle, ouverts dans les années 1839–1840 et en 1865, où les habitants de Lublin furent inscrits jusqu’en 1890 environ.
Icek Wolberg, le grand-père de Zlata, qui était cordonnier, habitait une maison n° 454.
Au XIXe siècle, on avait appliqué la numérotation continue des maisons (on l’appelait « Numéro policier ») – selon la nouvelle numérotation, c’était 27 rue Ruska.
- Départ pour la France
Nous avons consulté les registres des passeports délivrés dans les années 1925–1929 et 1932–1939 (les registres des années 1930–1931 étant manquants), ainsi que les demandes de passeports conservées en très petit nombre.
Nous n’y avons trouvé ni Zlata ni son mari – peut-être partirent-ils avant l’année 1925 ou dans les années 1930–31.
- Vie en France
Des informations sur la vie en France de Zlata ont été recueillies par des étudiants du Lycee Français de Varsovie René Goscinny. Des informations supplémentaires sur l’arrestation de Zlata et de son mari ont été fournies par M. Serge Jacubert.
Avant la guerre, Zlata vivait avec Cadok dans la ville de Lyon, Cadok a loué un appartement de 1937 à 1944 a la rue au 28 rue de l’Annonciade (P.J. 5 et 6). Il en ressort que Cadok serait parti en France avant 1937. Zlata était commerçante, elle vendait et achetait divers menus articles. Ce n’était pourtant pas sa seule occupation – elle travaillait aussi comme dactylo.
Le 22 juin 1944, ils entendirent quelqu’un frapper à la porte de leur modeste appartement de Lyon. Des agents de la Gestapo entrèrent dans leur immeuble à la recherche des conspirateurs ou maquisards luttant contre l’occupant allemand. Il s’agissait de Rywka Skorka, dont le nom français était Régine JACUBERT, et de son frère Yerme Skorka.
D’après les informations qu’ils possédaient, dans l’immeuble où vivaient les Dawidzon son devait se trouver à ce moment-là un conspirateur. Les Allemands perquisitionnèrent toute la maison, mais ils ne trouvèrent rien ni personne qui fût rattaché à la Résistance. Cela n’empêcha cependant pas l’arrestation de Zlata et Cadok alors qu’aucune procédure judiciaire n’était alors en cours contre eux. Le couple fut séparé, Zlata fut internée au Fort-Montluel le 22 juin 1944, puis détenue à Drancy du 30 juin jusqu’au 31 juillet 1944. Après ces deux arrêts, le 3 août 1944, elle arriva à Auschwitz où elle demeura jusqu’à la fin d’octobre 1944. Son dernier lieu de détention fut Kratzau où elle resta six mois encore, jusqu’au 11 mai 1945. Ce jour-là, elle fut libérée avec d’autres détenus lors des opérations de libération. Zlata Dawidzon réussit à survivre aux camps de concentration. Elle décida de retourner en France. Quelques années après la guerre, en 1951, elle demanda le statut d’internée politique. La réponse se fit longtemps attendre. Elle ne la reçut, avec l’octroi du statut, que trois ans plus tard, le 20 mars 1954. Et le 2 août 1954, elle obtint une indemnité due au statut accordé. De la réponse donnée au Directeur du Contentieux, de l’Etat-civil et des Recherches par le Directeur interdépartemental des Anciens Combattants et Victimes de Guerre, datant du mois d’avril 1953, nous apprenons que Zlata fut arrêtée parce qu’elle était israélite (juive). En 1973, conformément à la loi en vigueur, Zlata reçut une indemnité de la République fédérale d’Allemagne. Après la guerre, Zlata et Cadok s’installèrent à Paris, dans le 4e arrondissement, 32 rue Blancs-Manteaux.
PJ nr 2 – Plan de la Ville de Lublin de 1912
PJ nr 3 – Livre rabbinique – acte de naissance de Zlata
PJ nr 4 – Acte de naissance de Symcha Waldberg, le père de Zlata dans le livre rabbinique de 1882
PJ nr 5 – Immeuble a la rue de l’Annonciade 28, où elle a vécu et a été arrêtée avec son mari Zlata Dawidzon
PJ nr 6 – Immeuble a la rue de l’Annonciade 28
PJ nr 7 – Livre de la population permanente
PJ nr 8 – Acte de mariage des grands-parents d’Icek et d’Estera-Zlata du côté paternel.