Jeanne FEINSTEIN

1922 - | Naissance: | Arrestation: | Résidence:

Jeanne FEINSTEIN née FHAL,
remariée VIRLEUX

Jeanne Virleux née Fhal est l’une des 1310 déportés du convoi 77 du 31 juillet 1944. Elle a été déportée sous le nom de Jeanne Feinstein, patronyme de son premier mari.

Cette biographie repose sur des recherches dans des fonds d’archives et sur le témoignage filmé, très précieux, réalisé en 1996 lorsque Jeanne Fhal Virleux avait 75 ans.

 

La vie en Algérie

Jeanne Virleux est née le 28 mars 1922[1] à Khenchela, près de Constantine[2] en Algérie. Son père, Joseph Fhal et sa mère Esther, née Allouche, ont eu sept enfants (4 garçons et 3 filles[3]). Jeanne a décrit une enfance heureuse, auprès de ses parents aimants et de ses frères et sœurs à Khenchela : pour elle « c’était comme le paradis »[4]. Son père exerçait la profession de musicien-compositeur. Il participait à des soirées et à des fêtes religieuses.  L’un des frères de Jeanne devint bachelier. Quant à Jeanne, tout en allant à l’école, elle aimait vendre des chaussures (dans un magasin appelé le « Chat botté » dont le propriétaire était une gueule cassée de la première guerre mondiale). C’était une façon pour elle d’aider sa mère. Les souvenirs de cette enfance heureuse n’ont pas occulté la mémoire des émeutes anti-juives de Constantine[5] :  Jeanne se souvient être restée enfermée une journée avec son père, sans pouvoir joindre sa mère.

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L’arrivée en métropole et la veille de la seconde guerre mondiale

En 1937, Esther, la mère de Jeanne, décide de rejoindre la France, avec toute la famille Fhal, pour retrouver leur fils « chef-quartier-maître de sous-marins », qui s’était gravement blessé dans un accident de travail. Après avoir mis en vente leurs biens, toute la famille est arrivée à Marseille, à l’issue d’un voyage très éprouvant. Une fois installée à Paris, dans un « petit deux pièces » du 4e arrondissement, rue de Jouy, la famille fut cruellement éprouvée, car quinze jours après l’arrivée à Paris Esther décéda d’une congestion pulmonaire due au voyage[6].

L’un des frères de Jeanne s’installe ensuite dans un pavillon à Vincennes[7] mais Joseph Fhal, le père, supportait difficilement un mode de vie très éloigné de l’Algérie. Il choisit alors de déménager dans le Marais avec ses enfants, résidant successivement rue du Fauconnier puis rue François Miron dans le quartier de Saint Paul[8] et ensuite Quai des Célestins, lorsque les frères de Jeanne se mirent en quête de travail. La proximité de la communauté juive était une façon de retrouver certaines habitudes de l’Algérie. Son père travaille alors comme violoniste et guitariste dans les cafés, notamment pour des soirées dansantes. Jeanne est embauchée comme serveuse « au Milk Bar près de l’opéra, boulevard des Italiens »[9] ; elle a alors 15-16 ans.

L’année suivante, elle se marie avec Léon Feinstein[10] dans le respect des traditions juives. Léon Feinstein, fils de Samuel dit Emile Feinstein et d’Adèle Jacobsohn est un français d’origine polonaise né le 24 novembre 1912 dans le 12e arrondissement de Paris[11] qui exerce la profession de manœuvre. Jeanne et Léon Feinstein s’installent rue des Gravilliers[12],  dans le quartier parisien des Arts et Métiers. Leur fille naît l’année suivant le mariage[13].  À cette époque, la jeune Jeanne Feinstein « est très heureuse » dans sa famille.

La deuxième guerre mondiale et l’Occupation

Jeanne ne se souvenait pas – en 1996 tout du moins – de la déclaration de guerre du 3 septembre 1939[14]. L’année suivante, c’est la débâcle de l’armée française puis l’Occupation dans la partie nord de la France : une époque « atroce » selon Jeanne où « on ne vivait pas », « on se cachait » et où il y avait de la peur[15].

L’obligation pour les Juifs de se faire recenser, conduit Jeanne à se déclarer : « …à l’époque. C’était comme une fierté et il fallait le faire », dit-elle dans son témoignage. Puis elle porte l’étoile jaune obligatoire en vertu du Second statut des Juifs, à partir du 7 juin 1942. C’est pourquoi son patron la renvoie bien qu’elle soit une bonne vendeuse. Selon Jeanne, les juifs avaient conscience qu’ils risquaient d’être déportés. A la fin de l’année 1942, Jeanne quitte alors Paris.

 

La déportation du mari de Jeanne

Après 1942, Jeanne convainc son mari d’aller rejoindre sa sœur Louise qui est partie vivre à Marseille dans un hôtel, rue de la Solidarité. Mais, un jour de 1943[16], les Allemands font irruption dans l’hôtel provoquant la panique chez les résidants[17]. De nombreux hommes sont arrêtés parmi lesquels Léon Feinstein[18] et le beau-frère de Jeanne, Maurice Jaïs[19]. Le père de Jeanne -qui habitait aussi dans cet hôtel avec sa deuxième femme[20]– échappe à cette arrestation car il parlait arabe. En effet de nombreux juifs originaire d’Afrique du Nord ont été sauvés grâce à leur connaissance de la langue arabe et à leur nom[21].

Elle rapporte qu’une femme s’est présentée à elle comme étant une infirmière en charge des déportés, avec un billet d’adieu de son mari. Elle dit à Jeanne qu’elle peut le revoir, mais qu’elle doit cacher son argent, le coffret de sa mère ainsi que sa fille, car les Allemands peuvent revenir. Donc Jeanne confie sa fille et tout ce qu’elle possède à une voisine avant de partir avec l’infirmière. Cependant cette femme était un escroc, qui lui a ensuite pris ses biens en disant que c’était pour faire libérer son mari (après s’être cachée dans un café au cours Belsunce).

Jeanne retrouva la fausse infirmière et la fit arrêter par la police en appelant au secours. Le père de cette femme, avocat, proposa une somme d’argent contre le retrait de la plainte de Jeanne, afin de permettre la libération de sa fille. Jeanne accepta[22].

Après l’arrestation de son mari, Jeanne reste à Marseille avant de retourner vivre à Paris, dans un hôtel car l’appartement où elle habitait avec son mari à Paris a été mis sous scellés. Elle se débrouille comme elle peut, n’ayant plus d’économie depuis le vol de ses biens par la fausse infirmière de Marseille. Elle fait du marché noir entre Paris et Chartres à vélo, « cachée » (c’est-à-dire sans l’étoile) :  c’est comme cela qu’elle a pu se « défendre », dit-elle.  Elle reçoit aussi des secours par un organisme charitable installé au 36, rue Amelot, près de la Bastille : l’OSE[23], qui lui donne du linge. On lui conseille de placer sa fille chez une nourrice[24]. Elle allait la voir de temps en temps, mais toujours « cachée » c’est-à-dire sans papier, ni étoile. À cette époque, elle ne sait pas ce qu’est devenu Léon, son mari [25].

 

La déportation de Jeanne : de l’arrestation à Auschwitz

En juillet 1944, Jeanne habite place du Marché Sainte-Catherine et vit en exerçant, une nouvelle fois, la profession de vendeuse[26]. Vendre était quelque chose que Jeanne a toujours aimé faire. Le 14 juillet[27] 1944, Jeanne Feinstein est arrêtée par la Gestapo[28] dans une rue proche du commissariat du 4e arrondissement de Paris. Elle se trouvait avec André Virleux, non juif, qu’elle épousera par la suite, et un ami juif prénommé Victor Krieff[29]. Elle reste 48 heures au poste[30].

Ils décident alors d’interner Jeanne en raison de ses origines juives, le 17 juillet 1944 à 14 heures.[31] Le lendemain, le 18 juillet 1944 à 15 heures, elle est transférée à Drancy[32]. Elle est déportée le 31 juillet vers Birkenau Auschwitz[33]. Comme pour d’autres déportés, le voyage est traumatisant du fait de l’entassement des personnes et de la mortalité pendant le transport. Arrivée au camp d’Auschwitz-Birkenau, Jeanne est soumise à la sélection. Pendant la sélection faite par des soldats allemands qui confient à des prisonniers de séparer les déportés en deux files, les déportés reçoivent des coups de matraques, il y a des tirs de fusils et beaucoup de monde hurle. Âgée alors de vingt-deux ans, Jeanne est placée dans la file de gauche et sélectionnée pour le travail à l’usine [34]. Après la sélection, la tonte[35], la désinfection, le dépôt des biens personnels des prisonniers[36] et la douche, il y a l’attribution de vêtements : Jeanne porte de grands sabots en bois, « une robe » et un fichu.[37]  Puis le bloc numéro 16[38] lui est attribué. Comme les autres déportés d’Auschwitz, elle souffre de la faim et se souvient de conversations où elles « mangeaient oralement ». Par ailleurs, Jeanne n’est pas affectée à une équipe spéciale car elle ne parlait ni allemand, ni polonais.

Les jours passant, la vie au camp est de plus en plus difficile et le moral soumis à rude épreuve[39]. L’appel, fait par une femme que les déportées appelaient Blokoma, est particulièrement éprouvant. Cette femme terrorisait les détenues et recrutait, à coup de poings et de schlague, des volontaires pour travailler[40].  Onze personnes dont Jeanne sont ainsi allés travailler dans une usine de pièces pour avions.[41] Il n’y avait pas de contact avec les civils ou les ouvriers mais les prisonniers leur envoyaient du pain.

A Auschwitz, Jeanne réussit à « tenir » grâce à la solidarité entre déportées. Certaines nouvelles de la guerre arrivaient dans le camp (des tracts disant la libération proche, mais Jeanne n’y croyait pas). Elle ne voyait jamais le ciel et avait l’impression qu’il était très bas et très rouge.

Après Auschwitz, Jeanne fut envoyée au camp de Theresienstadt[42], pas loin de Prague, en Tchécoslovaquie. À cette période tout ce qu’elle voulait, c’était mourir. Une nuit, un homme entra dans le camp pour dire que tout serait fini le lendemain. Jeanne transmit ce message aux autres déportées mais beaucoup de femmes prirent peur et se seraient suicidées. À ce moment, il n’y avait plus d’Allemand avec les déportées du camp : elle ne le sut qu’à distance des événements.

Lorsque Jeanne était à Bergen-Belsen, la vie était plus dure qu’à Auschwitz-Birkenau, car à Bergen-Belsen les déportés dormaient sur le sol : chaque matin, les déportées devaient enterrer les morts causés par de mauvaises conditions de vie. Le 7 février 1945 Jeanne fut transférée de Bergen-Belsen à Buchenwald/Raghun où elle arrive le 10 février 1945[43]. La carte de travail retrouvée dans les archives semble indiquer qu’elle était de nouveau mobilisée pour le travail à Buchenwald[44].

 

La libération des camps et le retour des déportés

Lors de la libération du camp de Buchenwald [45], un homme, sans doute de la Croix Rouge lui proposa de rentrer à Paris dans un petit avion. Arrivée à Lyon[46], son père informé de l’arrivée de déportées l’attendait. C’était un jour de Shabbat[47]. Elle fut interrogée avec suspicion car elle portait des bijoux et pouvait passer pour une complice des Allemands.  De retour à Paris, elle récupéra immédiatement sa fille, restée chez sa nourrice. Jeanne rentra avec un abcès à la jambe et un foie abîmé à cause de la malnutrition et de la faim éprouvée dans les camps[48]. Elle ne raconta rien de sa terrible expérience à sa famille à son retour. Plus tard, elle en parlera, quelques fois, à ses enfants[49].

 

L’après-guerre

Après-guerre, Jeanne retourna en Algérie pour voir la tombe de sa mère. L’un de ses fils naquit lors du voyage[50]. Elle revint ensuite à Paris et se maria avec André Virleux[51]. En septembre 1956 elle obtint le titre de déporté politique[52].

Jeanne Virleux est inscrite sous le nom de Jeanne Feinstein sur le mur des déportés de la Shoah au Mémorial de la Shoah de Paris. Dans l’annuaire de Serge Klarsfeld, Jeanne Virleux est inscrite sous le nom d’Imouna Virleux. Imouna est son deuxième prénom[53].

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Biographie réalisée par Ayat Abdouli

Master 1 Archives à l’université de Paris 8

(2017-2018) dans le cadre du cours Archives de la Shoah sous la direction du Professeure Marie-Anne MATARD-BONUCCI en partenariat avec Laurence Klejman et    l’association Convoi 77

 

Sources

-Archives du Mémorial de la Shoah, Paris

Fichier de la Préfecture de Police de la Seine et des camps de Drancy : Fichier adulte de Drancy  F_9_56918FEINSTEIN JEANNE NEE FAHL.

Copie du fichier de mutation du camp de Drancy des entrées du 6 juillet 1944 au 11 août 1944.

Copie du fichier de mutation du camp de Drancy de la préfecture de police pour Léon Feinstein (n°3. 105).

Fonds Judéo-Espagnol à Auschwitz J.E.A.A : Photographies de Jeanne Virleux avec sa famille devant l’hôtel de la rue de Jouy en 1938 et à l’exposition universelle en 1937.

Témoignage vidéo de Jeanne Virleux, le 22 avril 1996 par Malka Markovitch pour l’association Survivors of the Shoah Visual History Foundation (la Fondation d’histoire des survivants de la Shoah).

Carnet de fouille de Jeanne Feinstein.

 

-Archives Nationales, site de Pierrefitte-sur-Seine

Base de données de l’ITS (Bad-Arolsen) : dossier du ghetto de Theresienstadt (numéro de séquence 17347), dossier du camp de Bergen-Belsen (1950), dossier du camp de concentration de Buchenwald (21 mars 1945), dossier du camp de Drancy.

 

-Archives de Paris

Etat civil, registre 4M304_A, acte de mariage n°401 (4e arrondissement de Paris).

Etat civil, registre 4M304_A, acte de mariage n°451 (4e arrondissement de Paris).

Etat civil, acte de mariage n°1528 (12e arrondissement de Paris).

 

-Archives de la Préfecture de Police

Registre CP juillet-décembre 1944 (cote CC2 article 9).

Registre « Recensement israélites et entreprises juives » du 3e arrondissement de Paris par le Cabinet de préfet de police (ID16/ Chemise 4, n°652).

 

-Mairie du 4e arrondissement de Paris

Extrait de l’acte de mariage n°586.

 

– Service Historique de la Défense, des Archives des Victimes des Conflits Contemporains, Caen

Dossier de demande de titre de déporté politique de Jeanne Virleux née Fhal, de septembre 1956

(comprenant notamment une fiche individuelle d’état civil de Jeanne Virleux, l’extrait des minutes des actes de décès de Léon Feinstein)

 

 

Bibliographie

 

-AGERON Charles-Robert, « Une émeute anti-juive à Constantine (août 1934), dans Revue de l’Occident musulman et de la Méditerranée, n°13-14, 1973.

– GRYNBERG Anne, La Shoah. L’impossible oubli, Paris, Découverte Gallimard, 1995.

-LALOUM Jean, « Des Juifs d’Afrique du Nord au Pletzl . Une présence méconnue et des épreuves oubliées (1920-1945) », dans Archives Juives, 2005/2 (Vol. 38), p. 47-83.

URL : https://www.cairn.info/revue-archives-juives-2005-2-page-47.htm

-LALOUM Jean, Les Juifs dans la banlieue parisienne des années 20 aux années 50, Paris, CNRS, 1998.

– LEWINSKA Pélagia, Vingt mois à Auschwitz, Paris, 1945.

-MARRUS Michaël et PAXTON Robert, Vichy et les Juifs, Paris, France Calmann-Lévy, 1981.

-PRESSAC Jean-Claude, Les crématoires d’Auschwitz. La machinerie du meurtre de masse, Paris, CNRS Editions, 1993.

[1] Information issue du fichier de mutation du Camps de Drancy de la préfecture de police conservé en copie numérisée au Mémorial de la Shoah, ainsi que du « registre CP juillet-décembre 1944 » (cote CC2, article 9) conservé aux archives de la Préfecture de Police. Nous retrouvons ces informations dans Bad Arolsen versées aux Archives Nationales.

[2] D’après la fiche individuelle d’état civil de Jeanne Virleux (document issu du dossier de demande de titre de déporté politique de Jeanne conservé aux archives du Service Historique de la Défense, des Archives des Victimes des Conflits Contemporains (DAVCC) situées à Caen) et d’après son acte de mariage notamment.

[3] Le nombre d’enfants est déterminé à partir du témoignage vidéo de Jeanne Virleux. D’après la notice biographique faite par les archives du Mémorial de la Shoah, Jeanne est la sœur d’Elie Touitou et de Louise Jaïs. Le nom et le prénom de la mère de Jeanne proviennent du dossier de demande du titre de déporté politique pour Jeanne Virleux, déjà cité.

[4] D’après l’interview vidéo réalisé le 22 avril 1996 par Malka Markovitch pour l’association Survivors of the Shoah Visual History Foundation, consultable au Mémorial de la Shoah.

[5] De nombreux départs de juifs d’Algérie vers la France métropolitaine sont consécutifs à ces émeutes.

MARRUS Michaël et PAXTON Robert, Vichy et les Juifs, France Calmann-Lévy, 1981.

AGERON Charles-Robert, « Une émeute anti-juive à Constantine (août 1934), dans Revue de l’Occident musulman et de la Méditerranée, n°13-14, 1973. Vingt-trois Juifs, dont des enfants et quatre musulmans sont tués et il y a eu soixante-dix blessés.

[6] D’après d’autres témoignages de la famille, les Fhal habitent d’abord dans un hôtel de la rue François Miron.

LALOUM Jean, « Des Juifs d’Afrique du Nord au Pletzl ? Une présence méconnue et des épreuves oubliées (1920-1945) », Archives Juives, 2005/2 (Vol. 38), p. 47-83.

URL : https://www.cairn.info/revue-archives-juives-2005-2-page-47.htm

Il y a une photographie de Jeanne Virleux avec sa famille devant l’hôtel de la rue de Jouy en 1938 (Archives du mémorial de la Shoah, fonds Judéo-Espagnol à Auschwitz J.E.A.A.).

[7] D’après le témoignage vidéo de Jeanne Virleux et, LALOUM Jean, « Des Juifs d’Afrique du Nord au Pletzl ? Une présence méconnue et des épreuves oubliées (1920-1945) », Archives Juives, 2005/2 (Vol. 38), p. 47-83.

URL : https://www.cairn.info/revue-archives-juives-2005-2-page-47.htm

[8] D’après le témoignage vidéo de Jeanne Virleux et, LALOUM, op. cit.

[9] D’après le témoignage vidéo de Jeanne Virleux.

[10] Par ailleurs, leur acte de mariage (Archives de Paris, Etat civil, acte de mariage n°1528), célébré devant l’adjoint au maire du 12e arrondissement de Paris, indique que Léon s’est marié avec Jeanne Imouna Fhal le 19 décembre 1938 (lui avait 26 ans et Jeanne 16 ans). Léon, manœuvre, était fils de casquettiers habitants rue de Fécamp dans le 12e arrondissement de Paris. Jeanne, vendeuse, habitait rue du Fauconnier à Paris avec son père musicien.

[12] Information du témoignage vidéo de Jeanne Virleux confirmée par le n°652 du registre de recensement du 3e arrondissement de Paris par le Cabinet de préfet de police (registre « Recensement israélites et entreprises juives », ID16/ Chemise 4, Archives de la Préfecture de Police) conservé aux archives de la préfecture de Police : Léon Feinstein s’est fait recenser le 9 octobre 1940. Ils vivaient rue des Gravilliers avec deux autres personnes (par déduction il s’agit de Jeanne et leur fille). Le père de famille faisait la déclaration pour toute la famille.

[13] Dans l’interview vidéo Jeanne Virleux dit que sa fille serait née en 1938, mais selon le dossier de demande du titre de déporté politique de Jeanne Virleux conservé aux archives de la DAVCC à Caen, sa fille serait née en 1940.

[14] Dans son interview, Jeanne dit que son mari Léon est mobilisé en Angleterre puis « qu’il s’est sauvé ou qu’il a été prisonnier ». Il faut tenir compte des défaillances de la mémoire, surtout concernant une partie aussi douloureuse de sa vie.

[15] Transcription des paroles de Jeanne dans son témoignage pour décrire le début de la guerre.

Si l’arrivée des Allemands à Paris n’a guère laissé de trace dans la mémoire de Jeanne Feinstein, ces derniers sont constamment dans ses souvenirs.

[16] Une rafle avait eu lieu notamment dans le Vieux-Port de Marseille : c’est la grande rafle appelée par les Allemands « Opération Sultan ». Elle s’est déroulée dans les différents quartiers du 22 au 24 janvier 1943. En ce qui concerne Léon Feinstein, il est victime de la rafle dite « de l’Opéra ». Les raflés arrivent au camp de Royallieu à Compiègne où ils restent deux mois avant d’être déportés à Sobibor en Pologne.

« 10000 policiers français et plusieurs milliers de policiers allemands se concentrèrent à Marseille pour déplacer 22000 habitants dans d’autres quartiers et pour raser le Vieux-Port. » MARRUS Michaël et PAXTON Robert, Vichy et les Juifs, France Calmann-Lévy, 1981, p283.

[17] Témoignage vidéo de Jeanne Virleux.

[19] Archives de Paris, état civil, registre 4M304_A, acte de mariage n°451.

[20] Les registres de mariage du 4e arrondissement de Paris prouvent le remariage de Joseph Fhal père de Jeanne : Joseph Fahl veuf, cordonnier épouse la veuve Louise Ghronassia le 8 octobre 1940. (Archives de Paris, état civil, registre 4M304_A, acte de mariage n°401).

[21] D’autres exemples sont donnés par LALOUM, op. cit.

[22] D’après le témoignage vidéo de Jeanne Virleux. Lors de son interview elle comprend qu’à cet âge elle ne se rendait pas compte des conséquences que cela aurait pu avoir.

[23] L’OSE, association d’Aide et de Secours à l’Enfance a aidé de nombreux Juifs durant la seconde guerre mondiale. Cette association est toujours active. Il existait d’autres structures d’hébergement pour l’enfance comme la Commission centrale de l’enfance (CCE) ou bien l’Union des Juifs pour la résistance et l’entraide (UJRE). L’Union Générale des Israelites de France (UGIF) était une structure créée par les Allemands et l’administration française pour contrôler la population juive. Tous les Juifs étaient obligés de payer une cotisation.

LALOUM Jean, Les Juifs dans la banlieue parisienne des années 20 aux années 50, Paris, CNRS, 1998, p. 318.

[24] C’est grâce à ce placement chez une nourrice conseillée que la fille de Jeanne a pu survivre. Elle fait partie des enfants cachés.

[25] Dans son témoignage Jeanne rapporte que son beau-frère Maurice s’était sauvé du train et il lui a dit que les Allemands ont sûrement tué Léon. Mais d’après le dossier de demande de titre de déporté politique de Jeanne Virleux conservé aux archives de la DAVCC situées à Caen et d’après les archives du camp de Drancy conservées au Mémorial de la Shoah, Léon était à Birkenau-Auschwitz jusqu’à sa mort en septembre 1943.

[26] Elle exerçait la profession de vendeuse. C’est le métier qu’elle exerçait avant 1942. Nous n’avons aucune information concernant l’adresse exacte de son lieu de travail. Par ailleurs aucun dossier de spoliation n’a été trouvé dans la série AJ38 des Archives Nationales. Nous en déduisons que Jeanne n’a pas été spoliée.

[27]Dans le dossier de demande de titre de déporté politique de Jeanne Virleux conservé aux archives de la DAVCC situées à Caen la période d’internement qui a été prise en compte va du 14 au 30 juillet 1944.

[28]Dossier de demande de titre de déporté politique de Jeanne Virleux conservé aux archives de la DAVCC situées à Caen.

[29]Dans des documents de 1954 et 1956 du dossier de demande de titre de déporté politique de Jeanne Virleux, déjà cité.

[30]« Avec un fils du plus grand avocat de Paris » dit Jeanne sans précision dans son témoignage vidéo.

[31]Le numéro qui lui a été attribué est 12571 s.  Les ordres d’entrées ont été délivrés par les autorités appelées : «s.d aff. Juives » c’est-à-dire sécurité (Sicherheitsdienst) affaires Juives.

[32]Notons que la personne qui porte le numéro suivant à les mêmes informations que Jeanne mais les autorités qui ont délivré les ordres d’entrée sont différentes. Donc elles étaient prisonnières ensemble.

Jeanne est arrivée à Drancy le 18 juillet 1944, selon le carnet de fouille conservé au Mémorial de la Shoah.

« Registre CP de juillet-décembre 44 » conservé à la préfecture de police, (CC2, article 9).

[33]Dans un document conservé dans la base de données Bad Arolsen (Archives nationales ; 25/08/1949) il est noté que Jeanne est transférée de la CC/Prison à Auschwitz le 31 juillet 1944. Par ailleurs dans ce même document il est indiqué que son dernier domicile était Place du Marché Sainte-Catherine dans le 3e arrondissement de Paris. (Et les deux documents issus du dossier du camp de Drancy, conservé à Bad Arolsen et versé aux Archives Nationales de France, datant du 28 janvier 1957et du 22 décembre 1959 indiquent la même adresse).

Dans le fichier de mutation de Drancy du Mémorial de la Shoah, il est indiqué que Jeanne était de nationalité française (Constantine), vendeuse et qu’elle vivait dans le 4e arrondissement de Paris, Place du Marché Sainte-Catherine.

[34]Dans son témoignage Jeanne raconte qu’elle ne savait pas ce qui se passait si bien qu’elle répond au prisonnier qui la sélectionne pour la file de gauche qui mène à l’usine, qu’elle veut faire des claquettes et chanter, des activités qui lui plaisait beaucoup.

[35]Cela fait rire certains et pleurer d’autres d’après le témoignage de Jeanne Virleux déjà cité, car cela les déshumanise et leur enlève la féminité. D’après le témoignage de Madame LEWINSKA P., Vingt mois à Auschwitz, Paris, 1945 les rires sont aussi dus à la femme qui les tond.

[36]Traduction de « Haeftlings ». GRYNBERG Anne, La Shoah. L’impossible oubli, Paris, Découverte Gallimard, 1995, p.113.

[37]A ce moment un numéro est tatoué sur leur bras. Ils ne sont plus appelés que par ce numéro matricule. D’après GRYNBERG Anne, op. cit.

[38]Les blocs sont des baraquements où les déportés dorment.

[39]Parmi les souvenirs de Jeanne, il y a les deux blocs d’anthracite avec lesquels on les tirait en arrière dans le camp. Le jour où elle a vu un bloc avec une charrette et une personne pendue, son moral a changé.

[40]C’est un objet pour battre. Il vient de l’allemand schlagen, frapper.

[41]D’après le témoignage vidéo de Jeanne Virleux.

[42]D’après le fichier du ghetto de Theresienstadt conservé dans la base de données de Bad Arolsen (Archives nationales), Jeanne Feinstein était de religion juive et son numéro de séquence était le 17347.  Deux autres personnes de ce ghetto portent le même nom que Jeanne mais ils n’ont pas de lien de parenté avec Jeanne ni avec Léon Feinstein.

[43]D’après trois documents du 26 juin 1950 et 17 janvier 1950 issus des dossiers d’après-guerre concernant le camp de de Bergen-Belsen et conservés dans la base de données Bad Arolsen aux Archives nationales.

[44]Le numéro de prisonnière qui est attribué à Jeanne (Häflting Nummer) est le 47130.

Dans des documents du 21 mars 1945 du camp de concentration de Buchenwald conservés à Bad Arolsen et versés aux Archives nationales.

[45]Le 11 avril 1945 le camp de concentration de Buchenwald est libéré « par la IIIe Armée américaine du général George S. Patton. » D’après PRESSAC Jean-Claude, Les crématoires d’Auschwitz. La machinerie du meurtre de masse, Paris, CNRS Editions, 1993, page 123.

[46]D’après le témoignage de Jeanne et le dossier de demande du titre de déporté politique de Jeanne Virleux déjà cité où il est écrit qu’après la libération par l’avancée alliée, Jeanne est rapatriée à Lyon en juin 1945.

[47]Le Shabbat est un jour sacré dans la religion juive, allant du vendredi soir au samedi soir.

[48]D’après le témoignage vidéo de Jeanne Virleux.

[49]Jeanne Virleux a composé une chanson sur ce qu’elle a vécu lors de la déportation. Elle la chante dans son témoignage cité plus haut.

[50]D’après le témoignage vidéo de Jeanne Virleux.

[51]Mairie de Paris, extrait de l’acte de mariage n°586, quatrième arrondissement de Paris.

[52]D’après le dossier de demande de titre de déporté politique de Jeanne conservé aux archives de la DAVCC situées à Caen.

[53]D’après la fiche individuelle d’état civil de Jeanne Virleux (document issu du dossier de demande de titre de déporté politique de Jeanne conservé aux archives de la DAVCC situées à Caen) et d’après son acte de mariage conservé aux archives de Paris.

 

Contributeur(s)

Ayat ABDOULI, étudiante en M1 Archives 2017-2018, sous la direction de la Professeure Marie-Anne MATARD-BONUCCI, Université Paris 8, Vincennes-St Denis
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