Uziel MASSINE 1905 – 1979
Biographie instruite, documentée et rédigée par les élèves de Madame Nina MAKAROVA, professeure d’histoire à l’école 9 de DRUZHKIVKA, région de Donetsk, dans l’est ukrainien, où la langue parlée est le russe. Nous remercions Madame Raïssa SMIRNOV pour sa traduction du texte d’origine. Enfin, pour la lisibilité en français, certains passages ont été revus par l’éditeur.
En entrant dans le camp, les gens regroupés sous la menace des fusils mitrailleurs, n’entraient pas dans « l’échelon de la mort » mais dans l’éternité.
Le Mur des Noms au Mémorial de la Shoah « ce sont nos blessures » qu’il garde dans le secret de sa pierre et les livre à ceux qui le regardent » – a déclaré Simone Veil , qui fut elle-même déportée à Auschwitz, le 23 janvier 2005 à l’inauguration du Mur des Noms du Mémorial de la Shoah.
Le nom de M. Massine figure également sur ce Mur. Sur son inscription il n’y a que sa date de naissance.
Ouasil Massine est né à Ekaterinoslav, ville rebaptisée plus tard en Dnepropetrovsk (URSS), le 24 mai 1905. Actuellement, cette ville ukrainienne s’appelle Dnipro ou Dniepr. M. Missine est né le 24 mai 1905, année de la première révolution russe. Le nom de Massine figure sur la liste des habitants juifs qui avaient le droit de voter lors de l’élection à la 4-ème Douma (assemblée représentative locale) en 1912. Cette liste peut être consultée dans les archives d’ Ekaterinoslav [1].
Pour avoir le droit de vote à cette époque, il fallait :
- Bénéficier d’un patrimoine immobilier valant au moins 300 roubles,
- Posséder un établissement de commerce,
- Occuper un appartement individuel.
Cela signifie que la famille de Massine était assez aisée.
En 1914, la famille déménage en France. Pour quelle raison ? Il se peut que ce soit à cause des pogroms de l’époque, ou à cause de la Première guerre mondiale. A cette époque Massine avait 9 ans. Il était fils d’Abram Massine et de Chaï Lembrikova. Il est possible que la famille voulait rejoindre cartains de ses membres ayant précédemment émigré en France.
Dans la biographie du célèbre peintre Marc Chagall, il y a quelques lignes consacrées au danseur de ballet Léonide Fiodorovitch Massine, homonyme de Uziel Massine.
M. Chagall a vécu à Paris dans les années 30 – 40. Chagall fut arrêté par les nazis pendant l’occupation et seule l’intervention du Consul américain le sauva de la déportation dans un camp et lui permit de fuir les persécutions en émigrant aux Etats-Unis. Chagall dessinait les costumes pour les ballets mis en scène par Léonide Fiodorovitch Massine.
Uziel Massine était horloger de profession. En 1940, il sollicita un document d’identité, nécessaire pour son projet de mariage. Sa demande fut rejetée du fait que la Russie ne délivrait pas de document pour les réfugiés partis de ce pays La France lui délivra un « certificat pour usage administratif ».
Notons que sur sa fiche médicale établie à LANGENSTEIN sans doute autour du 4 mai 1945, lors de sa libération (il pesait 30 kg et la fiche mentionne qu’il fallait l’hospitaliser) il indique qu’il s’était engagé comme volontaire dans l’armée française. Mais nous ne savons pas quelle période il passée sous les drapeaux.
Il a été transféré au camp de Fleurines le 12 janvier 1942. Des actions de résistance ont eu lieu dans cette région pendant l’invasion allemande en 1940.
Il est fort probable que Massine a été transféré à Clefs le 9 juin 1942, comme indiqué par le document du Ministère des Anciens Combattants et Victimes de Guerre du 23/02/1958. La situation des détenus était très difficile, ils devaient supporter des humiliations et des outrages.
Massine y est resté du 9 juin 1942 peut-être jusqu’à la liquidation du camp, mais il en réchappe et est peut-être du nombre des échappés mentionnés dans l’article Wikipedia sur le camp de Clefs, dont l’évasion fut facilitée par des complicités locale. Sa trace est retrouvée malheureusement au 19 juillet 1944, pour son internement à Drancy.
Il est connu que près de Clefs il y avait un chantier forestier (abatage d’arbres) où il a travaillé. Il y avait un camp de travail pour les (juifs) internés qui s’appelait Beauregard près du château de Mélinais[1].
Dans les documents, André Rever et Andres Albert ont confirmé que U. Massine a été arrêté par la Gestapo le 18 juillet 1944 pour le sabotage à Raciel et comme Juif. Massine pouvait être l’un des 6 Juifs, arrêtés à Clefs qui ont fui les rafles et la déportation en 1943 aidés par la population locale. Il est très probable qu’il ait été membre de la Résistance.
Le 19 juillet il a été envoyé à Drancy et le 31.047.1944 il y était déjà. Le 31 juillet le convoi 77 part à destination d’Auschwitz. Dans ce convoi il y a eu 1300 personnes. 291 hommes et 283 femmes ont été sélectionnés pour les travaux. 68 hommes et 146 femmes ont survécu.
Les nazis se comportaient très brutalement avec les habitants parce que le débarquement anglo-américain avait déjà débuté en France. En janvier 1945 les troupes soviétiques s’approchent d’Auschwitz et le 26 janvier la marche de la mort commence pour Massine. Voici ce qu’en disent les détenus rescapés : « Ils marchaient d’un village à l’autre, d’une ville à l’autre. Chaque jour il fallait faire 25 km sous la pluie, la neige. Certains n’avaient pas de chaussures. Beaucoup portaient des savates en bois. Ils marchaient dans la neige profonde et cela demandait des efforts incroyables qui provoquaient l’épuisement. Les forces diminuaient de plus en plus. Les gens sentaient la mort arriver. Ils n’avaient pas le droit de s’arrêter, il était interdit de quitter les rangs. Si quelqu’un sortait des rangs il était abattu par une balle dans le dos. Celui qui s’asseyait était mis de côté et la personne mourait de froid. Le but de l’opération était de faire mourir le maximum de gens en route ».
Ainsi, il a été interné à Auschwitz du 3 août 1944 au 26 janvier 1945. Dans son dossier médical il est marqué qu’il avait perdu 30 kg.
De là, à pied, ils ont été transférés à Buchenwald où ils sont restés du 6 février 1945 au 25 février 1945. Après ils ont été transférés à Sachsenhausen le 27 février 1945. Il a été libéré le 11 avril 1945.
Nous savons qu’en 1947 il habite déjà à Paris. Il est parmi les premiers Juifs déportés qui ont été naturalisés – le 13 mai 1948. Il s’adresse aux organismes d’état pour solliciter une compensation en tant que victime de la guerre et des poursuites politiques. En 1955 il la touche à la hauteur de 12 000 (francs).
Il est décédé le 10 juin 1979 à 6h50 chez lui à l’adresse 23 rue des Rosiers.
Il était marié à Marguerite Augoustine Lucienne Vatine. La mort a été déclarée le 11 juin 1979 à 9h par Christian Daniel Paul, 27 ans, collègue habitant à l’époque au 114 Avenue Marx Dormoy à Montrouge (Hauts de Seine)
Massine Usiel dit Jean avait 74 ans.
Sources
> 1.Liste des électeurs municipaux à la 4ième Douma de l’Etat du district d’ Ekaterinoslav
Список городских избирателей в 4-ю Государственную Думу по
> Екатеринославскому уезду 1912. http//ressources.memorialdelashoah,org
> 2.Timeline of deportaions of French Yews do death camps[
> en.wikipedia.org/wiki/Tieline_of-…]
> 3 .Film. Les camps français de 1938 à 1946. Фильм.Французские концлагеря с 1938-1946
> учитель Макарова Нина Георгиевна Druzhkovka Donetsk region Ukraine
> 8th grade student ZSh №9 Tanya Skachkova
[1] http://finkelstein.free.fr/shoah/campBeauregard.html
[…] un groupe d’élèves, elle a mené des recherches sur Uziel Massine et a rédigé sa biographie (disponible ici). De son engagement constant pour l’enseignement de la Shoah au difficile processus de recherche […]