1937 – 1944 | Naissance: | Arrestation: | Résidence: ,

Berthe ASZER

L’édito

Deux classes de 3e n’ont pas eu peur de la pandémie et de partir en exploration historique, en cette étrange rentrée scolaire 2020. Guidés par deux enseignantes très engagées, Mmes Nathalie Berna et Marie Pourriot, 51 élèves ont fait leurs premiers pas d’enquêteurs et enquêtrices pour retracer les vies de deux déportés du convoi 77 : la très jeune Berthe Aszer et Simon Stanger. Deux personnes qui n’avaient rien en commun   sinon d’être fichées comme « juifs » par les lois françaises et allemandes en vigueur à l’été 1944, quand leurs chemins se croisent.

Berthe Aszer a 6 ans, et immédiatement les élèves qui ont entrepris de faire et écrire la biographie de cette jeune victime de la Shoah établissent un parallèle avec leur propre vie. Pour eux, c’était l’âge de l’entrée en CE1, et ce n’est pas très loin. Ils comprennent qu’elle n’a pas eu l’opportunité d’avoir leur chance d’être un jour collégienne. Ils sont d’emblée frappés en parcourant les documents dont ils disposent sur la jeune déportée par le fait qu’alors que Berthe a été assassinée à Auschwitz le 5 août 1944, son acte officiel de décès, en France, n’a été établi que le 30 mai 2013. Pourquoi avoir attendu presque soixante-dix ans pour que le sort de Berthe soit une fois pour toutes reconnu comme celui d’une victime française de la Shoah par son pays ? Qu’elle soit déclarée « Morte pour la France » ?

Les élèves partent alors sur les traces d’une famille de Juifs polonais émigrés en France, à Metz, où est née Berthe, puis arrivée à Paris, quand la guerre a éclaté et que les régions frontalières de l’Est sont devenues territoire du Reich.

Parallèlement, des élèves s’attèlent à reconstruire le parcours de Simon Stanger. Un jeune Juif polonais, installé en France pour y vivre, confiant dans la République française. Simon fait partie des premières personnes, des hommes essentiellement, visées par les lois antijuives édictées par l’Etat français de Philippe Pétain. Son histoire est celle d’un homme qui va tout tenter pour survivre à la barbarie, s’évadant à plusieurs reprises de camps d’internement français, et réussissant à revenir des camps d’extermination en Pologne, en mauvais état mais prêt à reconstruire sa vie. Ce qu’il a fait.

Les élèves ont découvert « de l’intérieur » ce que signifiaient pour les individus de tous âges les mesures antijuives et les rafles, dont celle du Vel d’Hiv qui arrêta Berthe et ses parents, ou cette convocation dite du Billet vert qui, en mai 1941, a convoqué des Juifs étrangers résidant à Paris, dont de très nombreux engagés volontaires pour      combattre les troupes allemandes, et à laquelle s’est rendu en toute confiance Simon Stanger. Avant de connaître ensemble le camp de Drancy et la déportation, Berthe et Simon avaient expérimenté, à des moments différents, le passage par les camps du Loiret, triste antichambre, au même titre que Drancy et Compiègne, notamment, des camps de la mort.

Les fruits de leurs recherches sont consignés dans un journal de bord illustré où documents d’archives et photos complètent un texte vivant et historiquement fondé, qui       apporte aux lecteurs un ensemble de connaissances qui va bien au-delà des biographies de Berthe et de Simon.

Leurs enquêtes sont minutieuses, sérieuses. L’historienne que je suis salue le travail qu’ils ont accompli, malgré les difficultés inhérentes à la situation sanitaire contemporaine, en allant chercher et trouver des documents dans les fonds des archives départementales et nationales, dans des livres, au Mémorial de la Shoah et à Yad Vashem, notamment. Ils ont ainsi fortement enrichi les faibles connaissances livrées par les dossiers qui sont à Caen, au Service historique de la défense, dans le fonds de la DAVCC – Division des archives de victimes des conflits contemporains.

Leurs récits, accompagnés de certaines des photos et dessins de la main de deux des élèves, prendront place sur le site de l’association Convoi 77. Ce travail d’histoire servira ainsi à tous, cependant, il n’est guère difficile d’imaginer qu’au plan personnel chacune et chacun des élèves en tirera une expérience qui renforcera sa conscience         citoyenne… et peut-être le goût pour l’histoire.

L. Klejman, historienne, convoi 77

 

Les débuts de notre enquête…

Présentation du projet

Nos professeures, Mme Berna et Mme Pourriot, nous présentent le projet en octobre 2020.

Nous sommes au début de notre année de Troisième, pas forcément motivés par le projet… Ce jour-là, nous apprenons que nous allons mener une enquête sur une enfant de 6 ans et demi, victime de la Shoah, assassinée…

L’histoire nous intrigue et nous interpelle d’autant plus lorsque nous découvrons le     premier document d’archives concernant cette petite fille prénommée Berthe.

En observant bien les documents, nous nous apercevons que l’acte de décès officiel est daté du 30 mai 2013.

Nous avions nous-mêmes 6 ans en 2013 et nous entrions en classe de CE1…

Petit à petit, nous prenons conscience que nous entrons dans la vie de cette petite fille oubliée…

Un acte de décès établi en 2013, alors qu’elle est décédée en août 1944…

Que s’est-il passé pour qu’après soixante-dix ans on la reconnaisse enfin « Morte en déportation » ?

 

Mention « Morte en déportation » ?

Que signifie cette mesure ? Qui y a droit ?

C’est « la loi n°85-258 du 15 mai 1985 qui a institué la mention mémorielle « Mort en déportation ». Elle est portée sur l’acte de décès de toute personne de nationalité française, ou résidant en France, ou sur un territoire antérieurement placé sous la souveraineté, le protectorat ou la tutelle de la France, qui, ayant fait l’objet d’un transfert dans un lieu reconnu comme lieu de déportation, y est décédée. »

Pourquoi Berthe Aszer, née en France, a-t-elle dû attendre près de soixante-dix ans pour obtenir cette mention sur son acte de décès ?

Notre enquête commence…

 

 

Metz, années 1920-1930

Herzson Aszer, né le 14 décembre 1900, à Varsovie, en Pologne et Chawa Aszer, née Tenenbaum le 20 août 1906, à Tarlow, en Pologne, célèbrent leur mariage, à Metz, le 19 mai 1927.
Herzson est commerçant et Chawa sans profession.

On sait, grâce aux AD de Moselle, dans un document où figurent les membres de l’association Kenesseth Israël, que les grands-parents maternels, Isek et Cipa Tenenbaum, arrivent à Metz, en 1924, après un passage par Varangéville, en Meurthe-et-Moselle (cote 304M112).

Isek Tenenbaum est né à Zavichost, en Pologne, le 25 novembre 1872.

Carle-Cipa (francisé en Cécile) Tenenbaum, née Libermann, est née le 17 mars 1875, à Tarlow, en Pologne.

Isek possède un récépissé de demande de carte d’identité étrangère. Il est indiqué dans le registre qu’ils ont trois enfants.

Ils s’installent au 1 bis rue de la Grande Armée, à Metz. Ils y tiennent un commerce de confection pour homme.

Le père de Berthe travaille-t-il dans la boutique familiale ? On ne sait pas. Il semble que la famille Aszer ait été très discrète à Metz.

Samuel Aszer, dit Samy, naît à Metz, le 23 mai 1928.

La famille Aszer demeure 9 rue Ausone, à Metz, à 2 km des grands-parents.

 

Metz dans les années 1920-1940

 

Metz est une commune française dans le département de la Moselle, qui se situe en Lorraine.

Metz est une des villes, victime de la guerre franco-allemande de 1870 qui est annexée à l’Allemagne de 1870 à 1918.

Après l’armistice de 1918, le département de la Moselle redevient français.

Ce nouveau rattachement à la France crée des tensions. Certains sont favorables à l’idée d’être Français quand d’autres s’opposent et sont pour le retour à l’Allemagne.

A cause du rattachement à la France, des citoyens allemands sont expulsés de Metz, en 1918 et 1919 tandis que des nouveaux arrivants polonais s’installent après l’éclatement de l’empire austro-hongrois.

Grâce à l’intervention des États-Unis, de nombreux expulsés allemands peuvent cependant revenir à partir de 1920, mais, au début des années 1920, Metz est économiquement très affectée.

En 1920, la population germanophone ne représente plus que 30% de la population messine. Elle se compose essentiellement d’ouvriers et de petits commerçants.

Cette partie de la population entretient un sentiment hostile à l’égard de la France…

Dès ces années-là, le commandement de l’état-major de la région Est siège à Metz. Par conséquent, la ville est très occupée par des militaires qui fréquentent plus de trois-cents cafés. On surnomme la ville le « Paris de l’Est ».

L’histoire de la ville de Metz est importante car la population est devenue bilingue après 48 années d’annexion, et la culture allemande imprègne le mode de vie des Messins.

La majorité des habitants de Metz possèdent, par conséquent, une double culture franco-allemande importante à la veille de la Seconde Guerre mondiale.

Il est nécessaire enfin de préciser qu’en 1939, 1/9ème de la population de Metz est juive, soit environ 10 000 personnes.

A cause de la défaite française, Metz est évacuée en mai 1940 puis déclarée « ville ouverte », le 14 juin 1940.

Trois jours plus tard, le 17 juin 1940, à 17 h précisément, une patrouille motorisée du 379e-Régiment, entre dans la ville désertée. Une heure plus tard, le drapeau à croix gammée est dressé sur la mairie de la ville.

D’emblée, malgré les accords signés entre les deux pays, le régime nazi applique immédiatement une politique d’annexion à Metz, comme dans le reste de la Moselle.

En août 1940, la Moselle annexée au Reich est déclarée « Judenfrei », libre de Juifs.

On en a donc déduit que si les Aszer étaient à Paris en 1940, c’est qu’ils avaient certainement anticipé leur départ…

L’administration municipale est reprise en main par les nazis, qui remplacent la plupart des cadres français. Les rues sont débaptisées, les enseignes des magasins enlevées pour être remplacées par des enseignes allemandes et la plupart des statues sont déboulonnées.

Metz est donc de nouveau occupée de 1940 à 1944. Elle est libérée entre le 19 et le 21 novembre 1944 par l’armée américaine.

M. Gaudin

 

1er septembre 1937, à l’hôpital Belle-Isle…

Berthe, dite « la petite Betty », naît à 15h15, le 1er septembre 1937, à Metz, à l’hôpital Belle-Isle.

 

L’hôpital Belle-Isle

L’hôpital Belle-Isle est créé en 1874 par les sœurs Diaconesses de Stuttgart, autrement appelées « Sœurs de Marthe ». Il s’agit, à l’origine, d’une maison de santé protestante pour femmes seules, enfants et vieillards, nommée Mathildenstift.

Le Comte Arnim von Boïtzeburg, alors président de Lorraine, finance en grande partie l’établissement.

En 1884, après dix années de fonctionnement, les locaux s’avèrent insuffisants et sont déplacés rue Belle-Isle, au bord de la Moselle.

A l’ouverture de ce nouvel établissement, il est annoncé que sont acceptés des malades de toutes confessions.

En 1919, qui marque la fin de l’annexion allemande, l’hôpital Mathildenstift change de nom et devient alors Hôpital des Remparts Belle-Isle, puis Hôpital Belle-Isle.

En 1945, à la suite des dégâts causés par la Seconde Guerre mondiale, l’établissement est reconstruit et se rééquipe pour ses activités.

A compter de 1963, un ambitieux projet immobilier permet d’augmenter la capacité d’accueil grâce à la construction de trois nouveaux bâtiments.

En 2006, l’établissement fête les 120 ans de la pose de la première pierre rue Belle-Isle.

E. Hourdequin
L. Barthon

 

 

Paris, 1940…

Un courrier du grand-père de Berthe, Isek Tennenbaum, daté de fin juillet 1942, évoque le départ de Herzson, sa femme et ses deux enfants de la ville de Metz. Celui-ci est conservé au Mémorial de la Shoah, à Paris.

Les grands-parents maternels, quant à eux, descendent à Nîmes à partir de mars 1941. Ils s’installent au 5 bis rue d’Albenas avec leur dernière fille, Sabine, une tante de Berthe.

On découvre, grâce aux AD du Gard (cote 1W139), que la famille Tenenbaum est une famille juive française. Il est mentionné qu’Isek et Carle-Cipa Tenenbaum ont 6 enfants…

Les Archives de Paris nous dévoilent également une demande d’inscription pour Samuel, au lycée Rollin, à Paris (IXe), pour l’année scolaire 1940-1941. La classe indiquée est la 4ème B1 (cote 3769W90).

Herzson donne comme adresse le 125 Boulevard Richard Lenoir, Paris (XIe).

On constate alors que l’ancien établissement de Samuel est aux Sables d’Olonne, en Vendée. La famille Aszer, après son départ de Metz, s’est-elle installée quelque temps en Vendée… ? On ne sait pas. Les AD de Vendée n’ont pas trouvé trace de Samuel dans un établissement.

Le registre du lycée Rollin, année scolaire 1940-1941, nous révèle que Samuel, dit Samy, est inscrit en tant que demi-pensionnaire. Il choisit l’anglais et l’espagnol comme langues vivantes, en classe de 4°B1.

On voit également que leur première adresse parisienne (125 Bld Richard Lenoir) est raturée et remplacée par leur dernière adresse connue : 64 avenue Simon Bolivar, Paris (XIXe).

Ses professeurs indiquent une attitude irrespectueuse, des résultats insuffisants. Il reçoit un blâme après passage en conseil de discipline puis est exclu de l’établissement… (cote 3769W56)

Après la publication de l’ordonnance allemande du 27 septembre 1940, la famille Aszer se fait recenser. C’est la préfecture de police française qui communique par voie de presse et d’affiches.

Les « ressortissants juifs devront, en conséquence, se présenter dans les commissariats des quartiers ou circonscriptions de leur domicile, munis de pièces d’identité. »

Le recensement a lieu du 3 au 19 octobre 1940.

 

Paris, dans les années 1930-1940

Le début des années 30 est marquée par l’amplification de la crise économique issue du krach boursier de 1929, la montée des extrémismes, des tensions internationales, de la xénophobie et de l’antisémitisme, et finalement le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale.

En 1934, l’affaire Stavisky provoque une crise politico-économique française. Le décès de l’escroc Alexandre Stavisky dans des circonstances mystérieuses n’a fait que         renforcer un antisémitisme déjà virulent en France.

En 1935, le couple Joliot-Curie obtient le prix Nobel de chimie pour la découverte de la radioactivité artificielle.

Après l’élection du Front Populaire et une vague de grèves qui ont paralysé le pays, les accords de Matignon sont signés entre le gouvernement de Léon Blum et la CGT et le CGPF. En juin 1936, les congés payés sont instaurés en France.

En 1937, l’exposition universelle se déroule dans les jardins du Trocadéro et sur le Champ-de-Mars.

Le 3 septembre 1939, la France déclare la guerre à l’Allemagne. S’ensuit un conflit armé qu’on a appelé la « drôle de guerre ». L’Allemagne lance alors en mai 1940 une grande offensive contre la France, ce qui provoque une fuite des populations qui craignent l’avancée allemande. L’armée française se retrouve en quelques jours seulement au bord de la déroute.

Puis vient la demande d’armistice de Pétain, le 17 juin 1940. Il est signé le 22 juin 1940 dans la forêt de Compiègne. Le territoire français est désormais divisé en deux parties : « la zone libre », dirigée par Pétain et « la zone occupée » sous domination allemande.

L’institut de propagande allemande antisémite est inauguré le 11 mai 1941, trois jours avant la convocation dite du Billet vert, place des Petits-Pères.

Des Juifs sont obligés de démissionner de leurs emplois, notamment dans la fonction publique, des magasins sont interdits aux Juifs ainsi que des lieux publics. On confisque les biens des personnes juives…

R. Bourlet
L. Chatelin

 

Le statut des Juifs

Deux lois encadrent le statut des Juifs sous le régime de Vichy : la loi du 3 octobre 1940 puis la loi du 2 juin 1941.

Que dit la loi d’octobre 1940 ? Elle exclut les Juifs de tous les postes de la fonction publique, des professions libérales, …  et proclame la notion de « race juive ». Elle permet la mise en œuvre d’une politique raciale et antisémite.

La « loi » de juin 1941 s’étend à tout le territoire français, occupé ou non occupé.

C’est l’ordonnance allemande du 29 mai 1942 qui impose aux Juifs, en France, le port de l’étoile jaune. Celle-ci est distribuée par les commissariats.

 

Le lycée Rollin, Paris, 1940-1944

Grande cité scolaire, cet établissement est issu de l’union de deux collèges, le collège Sainte-Barbe-Nicolle, rue des Postes, et le collège Sainte-Barbe-Lanneau, rue Cujas.

Il est aujourd’hui situé au 12 avenue Trudaine à Paris (IXe).

L’actuel bâtiment est construit en 1876. Il prend d’abord le nom de collège Sainte-Barbe en 1821, puis collège Rollin en 1830, lycée Rollin en 1919 et enfin lycée Jacques-Decour, en 1944.

C’est un des lycées français à avoir été rebaptisé à la Libération du nom d’un de ses professeurs, Résistant.

Grand établissement, il accueille des collégiens et des lycéens.

Samuel n’y reste pas longtemps. On sait qu’il est inscrit en octobre 1940 et il y reste jusqu’en avril 1941.

 

Le lycée Voltaire, à Paris…

Après son exclusion du lycée Rollin, Samuel arrive au lycée Voltaire, situé dans un quartier limitrophe de leur domicile – 64 avenue Simon Bolivar (Paris, XIXe) – car il n’y a pas de lycée dans le XIXe arrondissement.

A son arrivée le 26 avril 1941 (Archives de Paris 2689W36), il est inscrit en 5ème 8 B. Le lycée a dû estimer que ses résultats ne lui permettaient pas de rester en 4ème.

64 avenue Simon Bolivar, dans le XIXe arrondissement, c’est leur dernière adresse connue…

 

Le lycée Voltaire

 

 

Le lycée Voltaire est un établissement public parisien d’enseignement général et     technologique, situé dans le XIe arrondissement de Paris, au 101 avenue de la République.

Le lycée Voltaire est construit en 1885, sur un projet de l’architecte Eugène Train. Il est inauguré le 13 juillet 1891 par le président de la République, Sadi-Carnot.

Eugène Train développe dans ce lycée des fonctions inusitées auparavant, telles que des ateliers, une bibliothèque et une salle de projection équipée par M. Gaumont.

Les élèves y font leur première rentrée le 7 octobre 1890.

Longtemps, le lycée Voltaire est le seul lycée du Nord-Est parisien. Dans les     années 1930-1940, le lycée est payant et seuls les élèves assez bourgeois peuvent y accéder. Toutefois, un système de bourses très efficace dans une école qui est alors vraiment républicaine permet à des jeunes gens comme Samuel d’intégrer le lycée.

Jusqu’à la fin des années 1940, dans une partie du lycée, il y a des « classes », de la 11ème (= CP) à la 7ème (=CM2). Ces classes étaient mixtes.

Le lycée, lui, est exclusivement réservé aux garçons avant de devenir progressivement mixte en 1973.

Toutefois, un cours secondaire pour les jeunes filles est créé côté rue Spinoza, du   début du XXème aux années 1930.

En 1940, il n’y avait pas de filles au lycée, elles étaient uniquement dans les petites classes.

Entre 1932 et 1941, le proviseur se nomme Roger Rieumajou. Il a sûrement connu Samuel Aszer, scolarisé à partir d’ avril 1941.

Léon Zampa, concierge au lycée de 1914 à 1942 témoigne :

« Tous les élèves ont le même emploi du temps : les cours commencent à 8h30 et se terminent à 16h30 avec une pause pour le déjeuner. Une étude surveillée accueille les élèves à 8h le matin jusqu’à 18h le soir. L’administration offre un goûter, du thé et des tartines, aux élèves qui y restent. La discipline est assez stricte, le bavardage et l’indiscipline sont sanctionnés par une colle le jeudi. Chaque trimestre, les élèves ont une composition par matière. […] Chaque année, une solennelle distribution des copies fait l’objet de tout un cérémonial. »

 

 

Le lycée Voltaire aujourd’hui

Aujourd’hui, le lycée accueille environ 1000 lycéens, 500 collégiens et 75 élèves de classes préparatoires physique et technologie.

L’Association des Anciens Elèves est très active et nous a beaucoup aidés dans notre enquête ainsi que Marianne Cabaret, professeure au lycée. Nous les en remercions.

M. Victoire
L. Phommachanh-Aussiette

 

 

Le 16 juillet 1942, quand tout bascule…

Le 16 juillet 1942, la famille Aszer est arrêtée, à son domicile, lors de la grande rafle du Vel d’Hiv.

Sur les fiches de Herszon et Chawa, extraites du Fichier juif, est mentionnée l’indication suivante : « arrêté(e) le 16.7.42» (AN_cote F9-5605)

Berthe est arrêtée avec ses parents. Elle a 4 ans.

 

Le Vel d’Hiv

Le Vélodrome d’Hiver est construit en 1909, par Gaston Lambert et inauguré, en 1910, à Paris. Il est surnommé Vel’ d’Hiv.

Il est situé rue Nélaton dans le XVème arrondissement.

Il peut accueillir 17 000 personnes. On y fait des courses de cyclisme mais aussi des spectacles de cirque, des combats de boxe, des compétitions équestres, des meetings politiques, et même des défilés de mode.

En juillet 1942, il accueille plus de 8 000 Juifs pendant la Rafle du Vel d’Hiv.

 

L’organisation de la rafle du Vel d’Hiv

A la suite de la conférence de Wannsee, du 20 janvier 1942, durant laquelle est décidée « la Solution finale », les plus hauts responsables nazis organisent l’extermination de tous les Juifs d’Europe.

En France, le gouvernement Laval est appelé à collaborer en procédant à l’arrestation, au regroupement et à l’expulsion de 100 000 Juifs.

Des arrestations de Juifs ont déjà eu lieu à Paris, en 1941. Cette fois-ci, l’opération est d’une toute autre ampleur et nécessite une minutieuse préparation.

L’alliance franco-allemande se met d’accord pour arrêter 22000 Juifs de 16 à 55 ans, en région parisienne et 10000 autres en Zone libre.

L’opération doit avoir lieu le 13 juillet 1942, mais elle est repoussée au 16 juillet 1942.

L’opération mobilise 6000 agents de la police française.

 

Le déroulement de la rafle 

Dans la nuit du 16 au 17 juillet 1942, la gendarmerie et milice françaises viennent    chercher les Juifs chez eux pour les faire sortir de force.

« Deux hommes sont entrés dans la chambre, grands avec des imperméables beiges. « Dépêchez-vous, habillez-vous, ont-ils ordonné. On vous emmène. », extrait de La Petite fille du Vel d’Hiv, Annette Muller, 2012

Ce sont 13 152 personnes qui sont arrêtées dont 4 000 enfants de moins de 16 ans. C’est beaucoup mais deux fois moins que prévu.

Les personnes seules ou couple sans enfant sont emmenés au camp de Drancy et les familles au Vélodrome d’Hiver.

Ils restent environ quatre jours dans le Vel d’Hiv puis sont transférés dans les camps d’internement de Pithiviers et de Beaune-la-Rolande.

V. Féréol
S. Kolisso
Y. Joindot
S. Chatelier

 

Les Archives Nationales nous ont transmis les deux fiches du Fichier juif (cote F9-5605), celle d’Herszon et celle de Chana.

On découvre que lors du recensement, l’administration a enregistré leur nom de famille orthographié « ASCHER » alors qu’à Metz, l’orthographe utilisée est bien ASZER.

On constate également que le père de Berthe est enregistré comme ayant la nationalité « Russe », ce qui est erroné puisque l’on sait qu’il est né en Pologne.

 

 

4 jours au Vélodrome d’Hiver

La famille Aszer se retrouve enfermée au Vélodrome d’Hiver comme toutes les familles raflées.

Berthe est entourée de ses parents.

Qu’en est-il alors de Samuel, le frère de Berthe… ?

A-t-il réussi à échapper à la rafle depuis leur domicile ou bien a-t-il réussi à s’évader du Vel d’Hiv … ?

 

L’enfermement au Vel d’Hiv

Abram SZTULZAFT, dit Maurice, écrit la lettre suivante à sa femme Fajga (dite Flora), après la première nuit passée au Vel d’Hiv.

« Vél d’Hiv
Ma chère petite Flora,
[.] La nuit, je n’ai pas fermé les yeux. Il n’y avait pas de place pour s’allonger, et les bruits et cris et pleurs des enfants. Déjà chaque femme et ses enfants est un mode de misère. Jamais on aurait pu imaginer pareille chose. Parqués là pire que des bêtes, sans aucun soin d’hygiène ; deux cabinets toujours occupés pour des milliers de personnes. Il faut attendre des heures son tour. Pour l’eau, c’est pareil. »

Extrait de Je vous écris du Vel d’Hiv, les lettres retrouvées, Karen Taieb, 2011

 

« Couchée sur le gradin, je voyais les grosses lampes suspendues au-dessus des têtes, les cous tendus vers les haut-parleurs et, bizarrement, j’attendais que le spectacle commence, comme au cirque l’an passé. Le bruit allait cesser, les globes lumineux s’éteindre et de nouveau, peut-être, Blanche-Neige allait apparaître.
Cependant, Michel et moi avions soif. Nous voulions aller aux cabinets. Mais impossible de   passer dans les couloirs de sortie et, comme les autres, nous avons dû nous soulager sur place. Il y avait de la pisse et de la merde partout. J’avais mal à la tête, tout tournait, les cris, les grosses lampes suspendues, les haut-parleurs, la puanteur, la chaleur écrasante. »

Extrait de La Petite Fille du Vel d’Hiv, Annette Muller, Hachette, 2012

 

Paulette (Pesa) SZTOKFISZ (1906), deux enfants Jacques et Raymonde-Rachel, vit au 1 passage du Jeu-de-Boules, Xième. Voici ce qu’elle écrit dans une lettre retrouvée :

«Le Vel d’Hiv, le (sans date)
Cher beau-frère et sœur,
Je vous écris ces quelques mots pour vous donner de nos nouvelles qui sont bien tristes. La santé est bonne mais le moral tombe.
[.] Fais ça au plus vite car l’on doit s’en aller d’ici pour une destination inconnue. Dépêche-toi. Apporte-moi un gros oreiller. Des fruits pour Raymonde.
Ta sœur Paulette.
Apporte-moi le sucre et les conserves car on ne nous donne rien à manger. [.] »

Extrait de Je vous écris du Vel d’Hiv, les lettres retrouvées, Karen Taieb, 2011

 

 

Samuel rattrapé en Saône-et-Loire…

 

 

Nous avons suivi la trace de Samuel, dit Samy, et l’avons retrouvé.

Samuel a 14 ans lorsqu’il est arrêté par les douaniers allemands, le 19 juillet 1942, à Montceau-les-Mines (Saône-et-Loire), vraisemblablement sur la ligne de démarcation…

Nous imaginons qu’il a tenté de passer la ligne de démarcation, comme l’indique l’une de ses cousines, Valérie Tennenbaum, dans les documents déposés sur le site de Yadvashem, en 1992.

A-t-il échappé à la rafle le 16 juillet 1942 ? A-t-il réussi à s’échapper du Vel d’Hiv ?…

En observant de près le registre d’écrou des personnes appréhendées par les autorités allemandes du commissariat de police de Montceau-les-Mines, on observe qu’il est appréhendé le 19 juillet 1942, à 7h30 précises.

Il y reste jusqu’au 23 juillet 1942, 13h, à partir de quoi il est transféré à la prison de Châlons-sur-Saône.

Nous savons qu’il y reste jusqu’à la fin du mois de juillet 1942 puisque sa fiche d’entrée au camp de Pithiviers est datée du 1er août 1942.

A-t-il vu sa mère Chawa ou sa sœur Berthe lorsqu’il est arrivé à Pithiviers ? Se sont-ils croisés ? Ont-ils su l’un et l’autre qu’ils étaient dans le même camp ? Nous n’en avons aucune idée…

 

L’arrivée au camp de Pithiviers…

Berthe et ses parents, Herzson et Chawa, arrivent au camp d’internement de Pithiviers le 20 juillet 1942, comme indiqué sur leur fiche.

Comme toutes les familles, nous imaginons que le père va être séparé de sa femme et de sa fille. Se recroisent-ils ? Se reparlent-ils ?

 

Pourquoi Pithiviers ?

Avant 1941

Dès 1939, le gouvernement français crée plusieurs camps pour y rassembler les réfugiés et prisonniers de guerre.

Le camp de Pithiviers devient un camp d’internement après la défaite de 1940. Il est situé dans le Loiret, dans la région Centre Val-de-Loire.

Il est créé à Pithiviers car c’est proche de Paris (environ 100 km). Il y a une bonne accessibilité par le chemin de fer, possibilité de trouver sur place du           ravitaillement, la présence d’installations sécurisées (barbelés, miradors) qui ont déjà hébergé des prisonniers de guerre.

Les camps d’internement comme celui de Pithiviers sont placés sous l’autorité de l’État français. Ils sont aussi appelés « camps de transit » (les camps de transit doivent déporter les détenus en Allemagne).

 

1941 – 1942

La gestion du camp est confiée à l’administration française sous le contrôle des Allemands.

Le 14 mai 1941, avec la convocation dite du « Billet vert », plus de 3 700 hommes juifs étrangers sont internés, dont 1700 environ à Pithiviers, avant d’être envoyés à Auschwitz.

De nombreux Juifs sont arrêtés aussi pendant la rafle du Vel d’hiv, le 16 juillet 1942. Ce sont 7600 personnes qui sont transférées dans les camps du Loiret, où rien n’est prévu pour les accueillir.

Les conditions de vie dans le camp sont très difficiles. Des épidémies se déclarent. Les rations alimentaires ne sont pas suffisantes. Les internés font des dessins ou créent des objets sculptés. Ils ont le droit de travailler mais ce n’est pas une obligation.

 

 

Le père de Berthe, Herzson Aszer est déporté par le convoi n°13. Il part de Pithiviers le 31 juillet 1942, destination Auschwitz.

La mère de Berthe, Chawa Aszer, née Tenenbaum, est déportée par le convoi n°14. Elle part de Pithiviers le 3 août 1942, destination Auschwitz.

Samuel arrive le lendemain du départ de son père. A-t-il revu sa mère avant son départ ? A-t-il parlé à Berthe ?

 

Six convois partent de Pithiviers.

25 juin 1942, convoi n°4 ;

17 juillet 1942, convoi n°6 ;

31 juillet 1942, n°13 avec 690 hommes, 359 femmes, 147 enfants ;

3 août 1942, convoi n°14 avec 52 hommes, 982 femmes, 108 enfants ;

7 août 1942, convoi n°16 avec 198 hommes, 871 femmes, 300 enfants

21 septembre 1942, convoi n°15 avec 168 enfants.

 

Après septembre 1942

Le camp de Pithiviers est évacué à la fin du mois de septembre 1942 pour être     transformé en camp de concentration pour détenus politiques jusqu’en août 1944.

Les bâtiments sont détruits au cours des années 1950 pour des raisons matérielles, sans l’accord des associations mémorielles. Seule l’infirmerie, actuellement 2 rue de           Pontournois, est conservée, pour servir d’habitation.

L’ancien poste de garde, à l’entrée du camp, se trouve actuellement au Square Max Jacob, 50 rue de l’ancien camp. Celui-ci ne se situe pas à côté de la stèle explicative. Il n’y a plus rien. Seuls les récits des survivants permettent de se faire une idée des lieux. La limite opposée se situe à hauteur de l’actuel stade d’athlétisme, en retrait du 14 rue Gabriel Lelong.

En 1957, un monument est édifié sur le site du camp d’internement, de l’ancien camp, non loin de la gare. Une urne noire contenant des cendres d’Auschwitz-Birkenau est déposée. Sur la stèle sont gravés les noms des Juifs internés dans le camp.

En 1992, une plaque commémorative rappelant la déportation des enfants est     apposée sur le monument.

En 2021, la gare de Pithiviers est transformée en lieu de mémoire. Elle devrait être inaugurée à l’été 2021, année anniversaire de la convocation dite du « Billet vert ».

R. Bourlet
O. Séjourné
M. Flegny-Mereaux

 

 

Herzson Azser, parti le 31 juillet 1942, par le convoi n°13, a 41 ans.
Il n’est jamais revenu…

Chawa Aszer, partie le 3 août 1942, par le convoi n°14, a 35 ans.
Elle n’est jamais revenue…

Samuel Aszer , transféré à Drancy le 22 août 1942, parti le 26 août, par le convoi n°24, a 14 ans.
Il n’est jamais revenu…

 

 

A la mémoire de Berthe…

Berthe, 4 ans, se retrouve seule, sans famille…

 

 

N’oublions jamais…

 

Berthe hospitalisée…

Nous découvrons, grâce au Mémorial de la Shoah, qu’à la fin du mois d’août 1942, le grand-père maternel de Berthe, Icek Tenenbaum, installé à Nîmes, tente d’écrire à plusieurs reprises, sous la recommandation du Grand rabbin de Colmar, Ernest Weill, à Raoul Lambert, directeur général de l’UGIF, car il est inquiet pour ses petits-enfants. En vain…

Berthe passe tout le mois d’août dans le camp et finit par être hospitalisée le 17 septembre 1942, à l’hôpital de Pithiviers. Nous en ignorons la raison. Soit elle est malade, soit quelqu’un (de la Croix-Rouge ?) la fait passer pour malade…

Elle y reste jusqu’à la fin du mois.

 

L’hôpital de Pithiviers

 

Jadis…

Dès le Moyen Age, Pithiviers est doté d’un hôpital qui s’appelle l’Hôtel-Dieu. Il est tenu par des religieux. En 1902, l’hôpital est transféré boulevard Beauvallet, où il se trouve actuellement.

Deux témoignages ont permis de trouver des informations sur les semaines passées à l’hôpital.

1/ Travaux de recherche sur le site https://www.tharva.fr/, où l’on trouve des extraits de lettres de Bernard Jankelovitch, hospitalisé du 24 septembre 1942 au 25 mars 1943, à l’âge de 18 ans.

2/ Madeleine Fauconneau du Fresne, dans son récit De l’enfer des hommes à la cité de Dieu, publié en 1947, puis réédité sous le titre L’Etoile blanche, Mémoire d’une Juste 1940-1945 par E.  Rougier, en 2020. Elle est reconnue Juste parmi les nations depuis le 15 août 2018 (dossier 17046)

 

1941-1945

L’hôpital est dirigé par le Dr. Gautier, qui est aussi le médecin-chef du camp. Le personnel soignant est souvent composé de civils et « l’hôpital de la ville [est] tenu par les religieuses de Saint-Vincent-de-Paul », écrit Madeleine F. du Fresne.

Voici la description qu’elle en fait lorsqu’elle vient voir son amie Yvonne Netter, avocate militante juive, internée au camp de Pithiviers puis hospitalisée : «de vastes jardins, des allées sablées, puis un grand espace en friche sur lequel s’acharnaient en peinant un bon vieux et un énorme cheval de labour. »

Les visites des parents sont interdites auprès des internés du camp qui sont hospitalisés. Deux gendarmes surveillent. Madeleine, à force d’insistance, y parvient et voit son amie : « Elle était là, dans un lit bien propre, avec des draps des vrais. [.] Dans la grande salle ripolinée et claire, les lits tout blancs et tous pareils se serraient. »

Bernard, depuis son lit, écrit à ses parents, grâce à Yvonne : « Ne crois pas maman qu’à l’hôpital on est libre, on est enfermé, nous sommes toujours des Juifs. Il y a des gendarmes aux portes. » (L. 30.9.1942).

Les Juifs sont regroupés dans un dortoir qui s’appelle la Salle Hervé. Les femmes et les hommes sont tous dans la même pièce. Ils sont séparés par un paravent.

Les Juifs n’ont pas le droit d’aller dans les jardins :

« On est gardé par des gendarmes. On n’a pas le droit de sortir dans un jardin, on est séparé de tout le monde, les juifs sont à part de tout. » écrit Bernard à sa mère (L. 7.10.1942).

La nourriture n’est pas abondante. Un petit-déjeuner à 7h30 « un peu de café bruni », un repas du midi à 11h et celui du soir à 17h.

Bernard raconte :

« La nourriture est comme partout, des pommes de terre, des carottes et navets… le dimanche, on nous donne la traditionnelle noisette de viande et on ne nous en donne pas des quantités… Ce soir, nous avons eu une soupe et trois pommes de terre cuites à l’eau avec un peu de salade. » (L. 30.9.1942).

 

Dans cette salle, les adultes et les enfants se mêlent.

    « En face d’Yvonne, je vis une petite fille de cinq ans. Elle était sagement assise sur un petit pot de chambre et, ayant terminé l’opération, le rangea près d’elle avec soin. « On ne sait pas quelle langue elle parle », dit en soupirant la bonne Mère. « Elle ne répond à aucune question. » [.] La petite fille de cinq ans, un jour, ouvrit la bouche. Elle dit : « Je m’appelle Betty. » Et elle se mit à chanter. Son père avait été déporté d’un côté, sa mère de l’autre, ses frères aussi. Elle restait toute seule en ce monde, ce vaste monde… Elle n’y resta pas bien longtemps. A six ans, elle fut reprise, déportée, et envoyée au four crématoire. Nul ne sait plus rien de la petite Betty, si ce n’est Dieu. […] On amena aussi à l’hôpital « les politiques » comme les nommait pudiquement la bonne Mère : C’était « des durs » […]  Betty jouait avec les politiques. Mais quelquefois elle trouvait le temps long et longue la vie. « Vous avez de la chance, me disait-elle en me voyant partir le soir, vous êtes « pat-en-prison » »

J.Moll
M. Delbeke

 

Le témoignage de Madeleine est d’autant plus précieux qu’on y a retrouvé une trace de Berthe… 

 

 

La Croix-Rouge française…

Notre enquête nous conduit à nous interroger sur l’intervention d’associations comme la Croix-Rouge, sous le régime de Vichy.

Quel rôle la Croix-Rouge a-t-elle joué lors de la rafle du Vel d’Hiv ou dans les camps d’internement en France ?

Berthe a-t-elle bénéficié de l’aide d’une assistante sociale de la Croix-Rouge… ?

Il semblerait…

 

La Croix-Rouge en France

La Croix-Rouge française est une association d’aide humanitaire française fondée en 1864. Le siège international est situé à Genève, en Suisse. Elle a pour objectif de venir en aide aux civils français mais aussi aux étrangers arrêtés pour motifs   politiques, administratifs ou confessionnaux.

Pendant deux ans, de 1940 à 1942, la Croix-Rouge française distribue aide alimentaire et produits d’hygiène dans les camps et les prisons sous autorité allemande ayant des sections politiques, ainsi qu’aux camps de la zone libre (Rivesaltes, Noé, Vernet-d ‘Ariège, etc.).

En effet, en mars 1941, des permanences sont établies dans les camps de Compiègne, Pithiviers, Beaune-la-Rolande, puis à Drancy en septembre 1941. On y distribue du linge, des couvertures pour l’infirmerie, des suppléments alimentaires, des farines, des pois, des pâtes… mais les quantités autorisées restent limitées.

En septembre 1942, les autorités allemandes décident de supprimer la permanence sociale du camp de Drancy. L’aide accordée aux Juifs est désormais assurée par l’Union Générale des Israélites de France. En mai 1943, la Croix-Rouge française se voit aussi retirer ses activités d’aide aux familles d’internés au profit du Secours national, organe caritatif dépendant du gouvernement de Vichy et chargé de contrôler en temps de guerre les activités des associations qui viennent en aide aux civils.

Enfin, en 1945, la Croix-Rouge française participe au rapatriement des prisonniers de guerre et des déportés.

Il est à noter toutefois qu’on reproche à la Croix-Rouge de ne pas avoir alerté les instances internationales des traitements infligés aux détenus dans les camps…

E. Guillemot
K. Bregnard

 

« La biscuiterie Gringoire de Pithiviers nous a apporté une bonne quantité de biscuits et de pains d’épices pour les enfants. Mme Rolland (qui demeurait rue de Beauce) était présente au camp et a pu sauver une enfant : Betty Ashar. Elle était comme moi de la Croix-Rouge et comme moi déplorait la « prudence » de la Croix-Rouge : le sort des Juifs n’était pas sa première préoccupation. »

Extrait du courrier d’Annette au journal l’Express, 1990, cité dans Annette Monod, l’Ange du Vel d’Hiv de Drancy et des camps du Loiret, F. Anquetil, 2018

Il semblerait que « Betty Ashar », citée par Annette Monod, soit bien Berthe Aszer.

 

Témoignage d’Annette Monod, alors assistante sociale au sein de la Croix-Rouge française, d’abord envoyée au Vélodrome d’Hiver puis au camp de Beaune-la-Rolande.

« On arrête les femmes et les enfants. Ils sont au Vel d’Hiv. Puisque vous connaissez la     question, allez-y (…) Prévenue par téléphone par la Croix-Rouge française, je m’y rends. C’est un amoncellement de femmes, d’enfants, 12 800 personnes de tous les âges sont entassées.     Aucune organisation n’est possible. Les conditions matérielles sont horribles : pas de W.C., de coins tranquilles pour les malades. J’apprends qu’un transfert pour Beaune-la-Rolande va avoir lieu : les juifs étrangers des camps du Loiret ont été déportés et le camp peut recevoir un nouveau contingent. »

Citée par F. Anquetil, Annette Monod, l’Ange du Vel d’Hiv, de Drancy et des camps du Loiret, Editions Ampelos, 2018.

 

Berthe, à Beaune-la-Rolande…

En septembre 1942, le camp d’internement de Pithiviers est évacué car il accueille désormais des prisonniers politiques.

Berthe, qui est toujours à Pithiviers, est transférée au camp de Beaune-la-Rolande, comme de nombreux enfants…

Elle arrive à Beaune le 30 septembre 1942.

Seule, elle « fête » ses 5 ans, le 1er septembre…

 

Le camp de Beaune-la-Rolande

 

Où se trouve le camp ?

Beaune-la-Rolande est situé à environ 98 km au sud de Paris, 51 km au nord-est d’Orléans, 26 km au nord-ouest de Montargis et 19 km au sud-est de Pithiviers.

 

A quoi sert cet espace avant 1941 ?

En 1937, la municipalité de Beaune-la-Rolande construit un terrain de sport et une salle de gymnastique avec des douches ouvertes au public.

En 1938, et sans que la population ne sache vraiment pourquoi, le terrain d’une superficie de trois hectares est occupé par de nombreux baraquements (les baraques Adrian) qui deviennent plus tard « le camp ».

Chacun pense que ce camp est destiné à recevoir les prisonniers allemands faits dès le début de la guerre.

 

Que se passe-t-il quand le camp ouvre ?

Cet emplacement reçoit d’abord 22 000 prisonniers de guerre français après la défaite, dès mardi 18 juin 1940, détenus dans des conditions épouvantables.

Rapidement, les autorités allemandes agrandissent le camp. Des maisons et une ferme sont englobées et la route d’Auxy est coupée. Le commandant est un officier autrichien.

Les Allemands contrôlent le camp, mais les prisonniers sont trop nombreux. Ils sont envoyés chez les civils pour être en premier lieu nourris mais aussi pour servir et aider aux travaux.

En mai 1941, après la convocation dite du « billet vert », plus de 3 000 Juifs sont arrêtés, dont  2 000 internés au camp de Beaune-la-Rolande sous l’ordre des autorités allemandes.

Au début, les visites et les sorties sont possibles à condition d’être présent au pointage tous les jours.

Les internés sont dans des baraques, entassés les uns sur les autres, sur de la paille sale, jamais changée, sans aucun sanitaire.

A l’été 1942, ce sont plus de 3000 personnes qui sont internées à Beaune, à la suite de la rafle du Vélodrome d’Hiver, dans des conditions catastrophiques.

Deux convois pour Auschwitz partent de Beaune-la-Rolande :

28 juin 1942, convoi n°5

5 août 1942, convoi n°15.

 

Lorsque Berthe arrive à Beaune-la-Rolande, elle a perdu son père, son frère qu’elle n’a peut-être pas revu et surtout, elle a été violemment séparée de sa mère…

 

Après juillet 1943

Aloïs Brunner, le commandant du camp de Drancy, ordonne la fermeture du camp de Beaune-la-Rolande, le 12 juillet 1943.

En 1947, le camp est détruit. On construit sur le site une école ménagère agricole.

En octobre 1964, celle-ci est transformée en collège agricole féminin, après l’achèvement de constructions réalisées en 1963-1964 par les architectes Blareau et Guillaume.

En 1967, le site devient un lycée professionnel agricole.

A noter qu’en 1965, un monument commémoratif est édifié et que l’actuel établissement scolaire est situé « rue des Déportés ».

L. Cailler
G. Lucas

 

Témoignage d’Annette Muller, in La Petite fille du Vel d’Hiv, 2012 [les enfants viennent d’être séparés de leur mère, déportée par le convoi n°15]

« Le soir, allongée sur la paille souillée, je pleurais, mordant mes poings pour étouffer mes cris. Je ne pouvais pas supporter l’absence de ma mère.  […] Des jours durant, je ne   cessai de pleurer, prostrée sur la paille où grouillait la vermine. Je ne voulais plus sortir de la baraque. Michel me traînait à l’extérieur pour me faire prendre l’air. Il nettoyait les excréments qui me souillaient. […] Nous errions, couchant d’une baraque à l’autre, déguenillés, maigres, dévorés de poux, cherchant un peu de nourriture. Nous parcourions le sol jonché d’immondices où couraient les rats. On mangeait de l’herbe quand on en trouvait. »

   

 

Berthe, à la maison d’enfants de Montreuil…

A la suite d’une décision de la Préfecture du Loiret, le 7 décembre 1942, Berthe est libérée le 10 décembre 1942. Elle quitte le camp de Beaune-la-Rolande et est mise à disposition de l’UGIF.

Elle devient alors pensionnaire du Centre de Montreuil-sous-Bois.

Elle a désormais le statut dit d’« enfants bloqués» : les enfants sont sortis du camp mais gardent le statut de prisonniers.

 

Les maisons de l’UGIF

Les maisons de l’UGIF (Union Générale des Israélites de France) sont créées en 1941 par le gouvernement de Vichy à la demande des Allemands.

La mission de l’UGIF est d’assurer la représentation des Juifs auprès des pouvoirs publics, notamment pour les questions d’assistance, de prévoyance et de reclassement social.

Il y a des maisons car certains centres servent de logement aux enfants et personnes juifs.

En août 1942, il existe quatre maisons d’enfants, dont les parents ont été arrêtés, appartenant à l’UGIF (centre 40 de Neuilly, centre 30 du 9 de la rue Guy-Patin à Paris, centre 41 de La Varenne, centre 28 de la rue Lamarck, à Paris).

Fin octobre 1942, le centre 52 à Montreuil ouvre ses portes.

Juin 1943, deux nouvelles maisons d’enfants ouvrent (centre 56 de Louveciennes, centre 64 de Saint-Mandé).

Ces maisons regroupent :

1/ des enfants dits « libres », placés par leurs parents ou « abandonnés » pour diverses    raisons.

2/ Des enfants dits « bloqués » ou isolés, qui ont été internés puis libérés des camps et placés sous la responsabilité de l’UGIF. Ces enfants étrangers ou nés de parents étrangers sont fichés et «déportables» à tout moment.

 

La maison de Montreuil-sous-Bois

La maison de l’UGIF de Montreuil, où se trouve Berthe se situe au 21 rue François Deberque, à Montreuil.

Aujourd’hui, c’est une annexe d’école maternelle.

La plupart des dirigeants sont des Juifs de nationalité hongroise. Neuf personnes encadrent et le centre compte 768 employés en mai 1943.

Les deux dirigeants de ce centre sont alors Mme et M. Fruchter. Elle est de nationalité française et sert de couverture à son mari, de nationalité hongroise.

Le nombre d’enfants hébergés n’a pas beaucoup varié : 15 en avril 1943, 19 en   décembre 194, 21 en mai 1944, 15 en juillet 1944.

En période scolaire, les enfants du centre vont à l’école. Pour les enfants dits « bloqués », les contraintes sont lourdes : la Préfecture de Police exige la liste des visiteurs ayant emmené les enfants et les noms de ces derniers, lorsque certains sont autorisés à sortir.

Durant les derniers mois d’occupation, le sort de ces centres est de plus en plus précaire. On redoute une rafle. Aloïs Brunner, le commandant du camp de Drancy, exige la liste nominative des pensionnaires, ce qui accentue les craintes.

Un seul convoi part de la gare du Bourget en juin 1944 mais à la fin du mois de juillet, Alois Brunner veut assurer le départ d’un prochain convoi et souhaite rafler les pensionnaires des maisons.

C’est ainsi qu’entre les 20 et 24 juillet 1944, en pleine nuit, des arrestations ont lieu dans les maisons, dont celle de Montreuil, où se trouve Berthe. Ce sont 18 enfants et 4 assistantes sociales qui sont raflés pour le centre 52. Nous avons trouvé ces    informations dans le dossier rédigé par J. Laloum, « L’UGIF et ses maisons d’enfants : le centre de Montreuil-sous-Bois », in Le Monde juif, oct-dec. 1984.

A. Duthuillé
T. Catherine dit Cariot

 

 

Berthe, à Drancy…

Dix-huit enfants du centre 52, de Montreuil-sous-Bois, sont raflés en juillet 1944.

Berthe fait partie de ces dix-huit enfants et arrive à Drancy le 22 juillet 1944.

A 6 ans, elle a connu trois camps d’internement : Pithiviers (63 jours), Beaune-la-Rolande (70 jours), Drancy (9 jours) ; une hospitalisation (14 jours), un centre d’enfants (590 jours) et deux arrestations à deux années d’intervalle…

 

Drancy ou la cité de la Muette

Le camp de Drancy se situe en Île-de-France en Seine-Saint-Denis.

Dans les années 1930 environ, des logements sont construits, pour loger à bon marché (Habitations à Bon Marché) des familles venant de Drancy. Projet très moderne et audacieux à l’époque… ! Les constructions de ces bâtiments se sont déroulées de 1931 à 1937.

L’architecture de ces bâtiments se distingue car ils ont utilisé des matériaux standardisés et préfabriqués. 1250 logements sont prévus sur place. C’est un ensemble de tours de 14 étages auxquels sont rattachés deux par deux des immeubles allongés de 2 et 3 étages, surnommé « le peigne ». Un bâtiment en forme de fer à cheval entoure ces immeubles. Il est appelé « cour d’entrée ».

Ensuite, vers les années 1940, l’ensemble immobilier inachevé va servir de camp d’internement.

Les camps d’internement français sont des centres de détention administrative ou des camps de réfugiés, ou de prisonniers de guerre, puis de rassemblement des Juifs.

En août 1941, Drancy devient un camp de rassemblement et de transit.

Du 20 août 1941 au 17 août 1944, près de 80 000 personnes (hommes, femmes, enfants) ont été internées dans la banlieue parisienne, uniquement parce qu’ils étaient Juifs.

Le 20 Septembre 1941, la Croix-Rouge est autorisée à installer une permanence dans le camp. Ils fournissent les ravitaillements collectifs qui sont livrés par le comité de solidarité juif «de la rue Amelot ».

Par la suite, du nouveau mobilier pour les dortoirs est livré : lits superposés, paillasses, couvertures. Le courrier pour les internés est autorisé, ils ont le droit à une lettre tous les quinze jours.

Une trentaine de décès surviennent entre octobre et novembre 1941. 750 patients internés sont libérés sous contrôle d’une commission d’un médecin de la préfecture ainsi que des militaires allemands, dans la même période. En décembre 1941, des grands malades sont transférés dans différents hôpitaux.

Le 3 juillet 1942, à 6 heures tous les malades sont ramenés à Drancy par la police française. Les gendarmes qui sont chargés de fouiller les patients, en profitent souvent pour confisquer un peu ce qu’ils veulent pour leur propre compte ou pour alimenter le marché noir. Les visites sont interdites.

 

 

63 convois sont formés et partent de la gare du Bourget-Drancy jusqu’en juillet 1943. Puis ils partent ensuite de Bobigny. Ils emmènent donc au total plus de 65 000 personnes vers les centres de mise à mort, notamment vers Auschwitz-Birkenau.

Dans la deuxième partie de l’année de 1942, les nouveaux arrivants manquent de tout. Dans les périodes de rafles les plus fortes en 1942, le camp compte 7000 détenus, alors qu’il a une capacité de 5000 places maximum. Neuf Juifs sur dix passent par le camp de Drancy lors de la Shoah.

Au début de l’été 1944, devant la progression des forces alliées, des milliers de Juifs sont acheminés à Drancy depuis les villes du Sud pour être déportés.

Le dernier convoi part de Drancy, le 17 août 1944. Les déportés juifs marchent jusqu’à la gare de Bobigny. La marche est dirigée par le nazi Aloïs Brunner qui a pris la direction du camp un an plus tôt, le 18 juin 1943.

Le camp ferme ses portes en août 1944.

Les nazis finissent par brûler toutes les archives du camp pour ne plus avoir aucune preuve de toutes les tortures endurées ici mais deux internés du camp parviennent à sauver le fichier contenant tous les noms des déportés passés ici.

Le camp est ensuite confié à la résistance. Le 20 août, les derniers internés sont libérés.

Après la libération de Paris qui se déroule du 19 au 24 août 1944, le camp de Drancy est utilisé pour la détention des personnes suspectées de collaboration, comme l’écrivain et metteur en scène, Sacha Guitry, la cantatrice Germaine Lubin et plein d’autres encore…

M. Léglise
M. Gaudin

 

Les trois camps satellites parisiens de travail forcé

Il existe aussi trois camps satellites parisiens de travail forcé (Dienststelle Westen) qui dépendent de Drancy : le camp dit Lévitan (85-87 rue du Faubourg Saint-Martin, Paris Xe) ; le camp Austerlitz du 43 quai de la Gare (Paris XIIIe), où l’on regroupe et trie les biens volés aux Juifs ; et celui du 2 de la rue de Bassano, l’ancien hôtel particulier de la famille juive Cahen d’Anvers (la grand-mère de L. Klejman y a passé ses derniers mois avant sa déportation. On y faisait de la haute couture et de la fourrure de luxe.)

 

 

Drancy aujourd’hui

Aujourd’hui, ce sont entre 600 et 700 personnes qui louent les logements du bâtiment en « U ». Ceux-ci ont été conservés puis rendus à leur vocation d’habitation à la fin de la guerre.

Le camp de Drancy est sur la liste des monuments et des sites protégés depuis le 25 mai 2001. C’est ce jour-là que Catherine Tasca, ministre de la Culture, signe un arrêté de classement architectural de la cité de la Muette.

En 2009, des graffitis sur carreaux de plâtre sont retrouvés lors de travaux de rénovation. Ils ont été soit gravés soit écrits au crayon, majoritairement par des internés juifs. Le plus ancien graffiti retrouvé date d’août 1941. Les auteurs de ces graffitis inscrivent leur nom et leur date d’arrivée au camp, puis au fil du temps, ils ajoutent la date de départ. On y a retrouvé les noms de déportés du convoi 77.

Le 21 septembre 2012, à l’initiative de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, le président de la République, François Hollande, inaugure le Mémorial de la Shoah de Drancy. Exposition permanente et richement documentée, elle permet de connaître l’histoire de la cité de la Muette ainsi que le rôle central du camp de Drancy dans la déportation des Juifs de France, pendant la Seconde Guerre mondiale. Le site de ce camp est maintenant un lieu d’exposition visité.

M. Rigaud-Léonce

 

 

Berthe, dans le convoi 77…

La date du prochain départ tombe : le 31 juillet 1944.

Le convoi de Berthe comporte plus de 300 enfants.

Ils sont 60 enfants par wagon, un seul pot d’eau potable et deux ou trois grandes personnes.

 

Le convoi 77

L’association Convoi 77 a dénombré 1306 déportés – hommes, femmes, enfants –   partis par le convoi 77.

Le 31 juillet 1944, le convoi 77 est le dernier grand convoi de déportation de Juifs parti du camp de Drancy pour la gare de Bobigny, à destination du centre de mise à mort d’Auschwitz-Birkenau.

982 hommes et femmes

324 enfants

Le convoi part de Drancy en autobus avec 1306 déportés dont plus de 300 enfants. Il est ensuite dirigé vers la gare de Bobigny. Là, les Juifs sont mis dans des wagons à bestiaux.

Tout d’abord, il y a cinq arrêts en France dans la ville d’Épernay, Châlons-sur-Marne, Bar-Le-Duc, Novéant et Metz.

Ensuite, le convoi continue son trajet en Allemagne dans les villes de Saarbrucke, Frankfurt a Main (Francfort-sur-le-Main), Fulda, Erfurt, Leipzig et enfin Dresden.

Le convoi arrive en Pologne dans la ville de Gortliz. Ils passent à Cosel puis Katowice avant d’arriver au centre de mise à mort d’Auschwitz-Birkenau.

Le convoi est parti de Drancy, en France, le 31 juillet 1944 et arrive à Auschwitz-Birkenau, en Pologne, le 3 août 1944.

M. Ndala-Bituala
M. Allimonnier
S. El Hakkouni
B. Lesage

 

Berthe, à Auschwitz-Birkenau…

 

Berthe est assassinée à son arrivée au camp de Birkenau, le 5 août 1944. Elle a 6 ans…

   

Le centre de mise à mort d’Auschwitz-Birkenau

Construit en 1941, à 3 km du camp d’Auschwitz sur le terrain de Brzezinka en Pologne, le camp d’Auschwitz-Birkenau est un centre de mise à mort. Le plus grand camp ayant été construit. Il s’étend sur 175 hectares divisés en plusieurs sections.

Créé par Heinrich Himmler pour mettre en œuvre la « Solution finale », ce lieu a vu mourir plus d’1,1 million d’hommes, femmes et enfants, majoritairement juifs car la politique nazie est fondée sur une idéologie raciste et antisémite.

Auschwitz-Birkenau comprend cinq chambres à gaz et crématoriums, chacune pouvant accueillir 2500 prisonniers.

Entre les années 1942 et 1944, il devient le principal centre de mise à mort massive où des Juifs sont torturés et assassinés. Autre que l’extermination massive de plus d’un million d’hommes, de femmes et d’enfants juifs, et de dizaines de milliers de victimes polonaises, Auschwitz-Birkenau a aussi servi de centre de mise à mort à des milliers de Tsiganes et autres prisonniers de différentes nationalités européennes.

Les vieillards, les malades, les infirmes, les mères avec enfants, les femmes enceintes, les enfants en bas âge et les personnes jugées non nécessaires à l’économie de guerre allemande sont destinés aux chambres à gaz à leur arrivée.

 

C’est le cas de Berthe…

Fin novembre 1944, Heinrich Himmler donne l’ordre d’arrêter les opérations de gazage et de démanteler les installations de mise à mort. Face à l’avancée rapide de l’Armée rouge, le camp est évacué dans l’urgence, le 17 janvier 1945. « Les marches de la mort » entraînent sur les routes 58 000 prisonniers.

Au moins 1,3 million de personnes ont été déportées à Auschwitz dont 1,1 million de Juifs. Parmi ces derniers, près d’un million y ont été assassinés dont 69 000 Juifs de France.

 

Ce qu’il reste aujourd’hui

Les enceintes, les barbelés, les voies de garage, les quais, les baraquements, les potences, les chambres à gaz et les fours crématoires d’Auschwitz-Birkenau montrent le déroulement de la Shoah.

On a conservé le camp dans son état originel, sans aucune restauration ou construction.

L’ensemble du camp d’Auschwitz-Birkenau comprend 98 structures de briques et de bois et environ 300 ruines : ruines de chambres à gaz et de crématoires, entre autres.

Les Allemands ont dynamité les chambres à gaz et les fours crématoires pour qu’il ne reste aucune preuve…

L. Ferbus
K. Ventolini

 

Liens externes

https://fr.calameo.com/read/006788130ef57446315c7

Contributeur(s)

9th grade students from the la Forêt school in Traînou, in the Loiret department of France, with the guidance of their teachers, Ms. Pourriot and Ms. Berna.
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